Au détour d'un livre

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Une soupe aux herbes sauvages, de Emilie Carles

Une soupe aux herbes sauvages, de Emilie Carles

Résumé : Née avec le siècle dans un petit village des Hautes-Alpes, Émilie Carles est la seule, des six enfants de sa famille, à poursuivre ses études. Et à quel prix ! Pas question, chez ces paysans obligés de travailler d'arrache-pied pour survivre, de se passer d'une paire de bras valides. Les journées d'Émilie sont donc doubles : aux champs et à l'école. À seize ans, elle quitte sa vallée pour Paris, afin d'obtenir son diplôme d'institutrice. Monde nouveau, idées nouvelles. Revenue enseigner au pays, Émilie apprend à ses élèves la tolérance, le refus de la guerre et la fierté de leurs traditions paysannes...

Auteur : Emilie Carle
Nombre de pages : 349
Edition : Pocket
Collection : Littérature
Date de parution : 31 mai 2004 (1ère édition, 1982)
Prix : 21€ (broché) 5.95€ (poche) - 4€ (occasion)
Isbn : 978-2266145404
 

 

Avis / Critique :


C’est l’histoire d’une vie. Une belle vie, même si elle a été trop souvent marquée par la tragédie. Une vie de courage, d’amour et de générosité.
Cette vie commence dans le Briançonnais où la petite Émilie naît, avant-dernière d’une famille de paysans qui compte cinq enfants. À quatre ans, elle devient orpheline de mère quand celle-ci meurt foudroyée dans un champs en pleine moisson.
Nous sommes au début du XXème siècle, et la vie est très dure pour les paysans dans ces montagnes. Ils parviennent tout juste à cultiver de quoi se nourrir, ils n’ont que trois mois d’été qui sont une course contre la montre pour pouvoir récolter tout ce dont ils auront besoin pendant les longs mois d’hiver.

L’auteur nous raconte la dureté et la rudesse de ce milieu, hantées par la jalousie, les mesquineries, l’alcoolisme. La vie d’un enfant compte si peu : beaucoup viennent, un peu moins repartent. A 6 ans, elle fait une chute qui aurait dû être mortelle : son père n’appelle pas le médecin, car ça ne se fait pas à l’époque. Elle récupèrera d’elle-même. Plus tard, à l’école, elle devra mener de front ses études – car elle veut être institutrice – avec les travaux des champs. Difficile dans un monde où l’instruction est vue d’un mauvais œil, où lire est une activité de feignant.
Puis vient la Grande guerre qui bouleverse la vie du village. Les hommes vaillant s’en vont. Un des frères d’Emilie, un jour de permission, lui ouvre les yeux sur l’horreur de la guerre et l’absurdité du patriotisme. Le monde de la jeune fille s’écroule. Ce frère repart au front et ne reviendra jamais.
Après la guerre, elle doit monter à Paris pour poursuivre ses études. Là, ses amis anarchistes continueront à la convaincre de l’injustice du monde et que les choses doivent changer.
Forcée d’interrompre ses études et de rentrer au pays pour raisons de santé, elle est institutrice dans des petits hameaux avant de revenir dans son village natal où elle pourra aider son père.

Plus tard, elle se marie avec Jean Carles, un ouvrier qui parvient à la séduire par sa culture et ses idées politiques.
Toujours, que ce soit pendant son enfance où seul le travail à sa place, ou plus tard quand elle remet en cause ses idées politiques, la figure du père est là. Un père courage qui doit s’en sortir sans femme. On sent qu’il aime ses enfants même si sa dignité – tout le monde se doit d’être digne dans ce milieu – l’empêche de manifester cet amour. Quand il sera vieux, c’est Emilie et son mari qui le soutiendront.
C’est sûrement grâce à l’amour de ce père pour ses enfants qu’elle témoignera d’autant de générosité et d’altruisme dans sa vie, et sans doute aussi grâce à cet amour qu’elle parviendra à faire face aux terribles coups du destin qui la frapperont.

Au long des pages, on suit les péripéties de la fillette, puis de la femme, jusqu’à sa vieillesse et son dernier combat pour sauver sa vallée, avec un grand intérêt. C’est un témoignage passionnant sur la vie d’un petit village de montagne, et sur une âme généreuse.
Le livre est un peu oublié de nos jours. Publié à titre posthume au début des années 80, il a pourtant connu un grand succès. Peut-être parce qu’il sonnait le glas d’un monde qui venait de disparaître pendant les trente glorieuses : la paysannerie.

De nos jours, cette soupe aux herbes sauvages à un goût à la fois relevé et sensible qui donne chaud au coeur.

 

"Une soupe aux herbes sauvages, de Emilie Carles - www.audetourdunlivre.com"

 

Extrait :


Il y avait ici un paysan qui se mourait d'urémie. Quand je dis qui se mourait, il est resté debout sur ses jambes jusqu'au dernier jour, mais il était condamné par les médecins. Cet homme-là avait attrapé de l'urée, il avait six grammes d'urée et il croyait s'en tirer. Il venait me voir et me disait : « Emilie, tu vas venir avec moi au médecin, ils disent que je suis alcoolique, mais tu m'as vu soûl toi ? tu m'as vu soûl une seule fois ? »
Qu'est-ce que je pouvais lui répondre ? Je lui disais : « Non, je ne t'ai jamais vu soûl mais je t'ai vu boire de bons coups.
- Emilie, ils disent que je suis alcoolique, il faut que tu viennes et que tu leur dises que tu ne m'as jamais vu soûl. »
Certes je ne l'avais jamais vu en train de tituber mais il buvait ses quatre litres de vin par jour soi-disant parce qu'il était un travailleur de force. Il buvait un litre au petit déjeuner, un autre à midi, un autre à quatre heures et un dernier le soir. Lui, disait qu'il n'était jamais soûl et il n'admettait pas qu'on lui en fasse le reproche, encore moins de tomber malade à cause de ça. Pour lui, c'était inconcevable.
Avec six grammes d'urée il ne pouvait pas s'en tirer. Les médecins disaient qu'ils n'avaient jamais vu un cas pareil, c'était un vrai record, mais lui ne l'entendait pas de cette oreille, il voulait vivre. Pour se libérer de ce qu'il appelait le mauvais sang il n'avait rien trouvé de mieux que de se faire arracher toutes ses dents. Il était comme fou, il ne voulait pas mourir et il se disait : « Ils vont m'arracher les dents et ça saignera; ça saignera tant et tant que ça me libérera de tout ce mauvais sang. Comme je ne bois plus, je renouvellerai mon sang et je pourrai vivre. »
On avait beau dire qu'un siècle s'était écoulé entre le début de la guerre et après, il restait quand même pas mal de choses à changer, et c’était justement cette question qui me préoccupait à cette époque-là : le rôle que je devais avoir auprès des enfants dans des pays comme les nôtres. C'était difficile de se faire une idée mais ça me paraissait essentiel d'essayer. Ce qu'il fallait avant tout, c'était leur ouvrir les yeux, faire tomber toutes ces vieilles coutumes pour leur apprendre à vivre autrement, leur apprendre à vivre tout court et à aimer la vie, les détacher de l'alcoolisme et les prévenir contre les mensonges et les stupidités de l’Église et de l’État.

Depuis que j'étais petite fille j'avais tellement désiré devenir maîtresse d'école que j'avais eu le temps de prendre conscience de l'importance de cette mission. A mes yeux les instituteurs sont responsables de toute la société. Ce sont eux qui ouvrent l'esprit aux gosses, qui leur montrent ce qui est bien et ce qui est mal. Cette responsabilité était maintenant la mienne et je devais en assumer les conséquences. Je me sentais suffisamment courageuse et patiente pour y parvenir, parce que, quand on a des gosses avec soi, il ne suffit pas de leur apprendre à lire, à écrire et à compter, il faut aussi leur apprendre à lire entre les lignes c'est-à-dire à réfléchir et à penser par eux-mêmes, et ça, ce n'est pas toujours facile. Ce qui est essentiel, c'est qu'un enfant dans une classe, n'importe lequel, se sente aimé et considéré, qu'il sente que le maître ou la maîtresse ne le prend ni pour un numéro ni pour un polichinelle, et que tout ce qu'on lui demande, c'est pour son bien. A partir de là bien des choses peuvent se passer, mais il faut de l'amour pour y parvenir. Sans amour il vaut mieux ne pas enseigner, il vaut mieux faire un autre métier. Pour moi c'était une vocation.

Et puis, il n'y avait pas que les enfants, il y avait aussi les parents et les grands-parents. C'étaient eux qui retenaient le progrès et empêchaient les idées nouvelles de s'imposer. A cette époque-là je le pensais déjà : « Quand on a les enfants on a les parents » et c'est vrai. Ce sont les enfants qui amènent d'autres idées à l'intérieur de la famille, même si elles ne sont pas acceptées tout de suite, elles font leur chemin et peu à peu ce sont les enfants qui prennent le dessus. Il restait tant de choses à faire, tant de vieilles idées et des habitudes à mettre en l'air. Le patriarcat, le droit d'aînesse, la soumission des femmes, l'abrutissement par le travail, l’alcoolisme, les croyances, la superstition et bien d’autres encore. C’était à moi de leur apprendre tout ça, j’étais décidée à me battre si nécessaire. Déjà, je savais que je ne leur ferai jamais chanter Flotte petit drapeau ni même La Marseillaise, ce chant de guerre, je savais que je ne leur raconterai jamais des histoires à dormir debout sur les belles batailles, l’héroïsme et la sainteté. Je n’avais qu’une chose à faire, leur ouvrir l’esprit, faire en sorte qu’ils transforment leur vie pour avoir plus de bien-être et qu’ils sortent de leur isolement et de leur aliénation. C’est ça que je voulais leur apprendre, je me disais que si je pouvais prétendre avoir une influence dans ce pays, ça serait celle-là et pas une autre.

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