9 Novembre 2017
QUI EST VERNON SUBUTEX ?
Une légende urbaine.
Un ange déchu.
Un disparu qui ne cesse de ressurgir.
Le détenteur d’un secret.
Le dernier témoin d’un monde disparu.
L’ultime visage de notre comédie inhumaine.
Notre fantôme à tous.
Auteur : Virginie Despentes
Nombre de pages : 432
Editeur : Le Livre de Poche
Collection : Littérature & Documents
Date de parution : 2 mars 2016
Prix : 19.90€ (Broché) - 7.90€ (Poche) - 7.99€ (epub, mobi) - 2.96€ (Occasion)
ISBN : 978-2253087663
Petit préambule à cette critique : comme les avis des contributeurs de ce blog étaient parfois contradictoires, nous avons décidé de faire une critique à quatre mains, c’est-à-dire à deux voix. Cela tombe bien, car comme le roman est une succession de voix différentes, cette mise en abyme est fort opportune.
Evil.g : Vernon Subutex est un disquaire parisien ruiné, proche de la cinquantaine, qui se fait expulsé. Parmi les quelques affaires qu’il parvient à emporter à la va-vite, il y a les cassettes vidéos prétendument testamentaires laissées par un de ses amis, chanteur à succès qui vient de mourir.
Le parti-pris du livre, c’est de raconter l’histoire à travers le regard de ses différents personnages. Chacun des chapitres raconte donc une tranche de vie de quelqu’un lié de près ou de loin à l’histoire de Vernon. Ce n’est pas écrit à la première personne, mais à chaque fois l’auteure parvient à se glisser dans la peau du personnage.
On voit donc défiler une quinzaine de personnes, d’origine sociale ou ethnique complètement différentes, avec comme fil rouge Vernon et ses cassettes vidéos. Il y a, pêle-mêle et dans le désordre, un scénariste sur le retour, une ex-star du porno, un trader plein aux as, une ancienne groupie malheureuse en amour, un jeune militant d’extrême droite, une transsexuelle brésilienne, une jeune fille voilée... Ce procédé permet d’enrichir l’histoire de plusieurs facettes : tel évènement vécu par un personnage aura une signification différente pour un autre. Un des gros intérêts du livre c’est la confrontation de ces points de vue.
Virginie Despentes parvient en plus à donner à chacun de ses personnages une véritable épaisseur et c’est avec regret que l’on en quitte certains à la fin du chapitre. Même si on en retrouve certains un peu plus loin.
Par ailleurs, bien que l’histoire ne soit pas spécialement amusante, l’auteur parvient à nous faire sourire par la critique des mœurs des Parisiens de ce début de XXIème siècle, tous accros aux réseaux sociaux : Internet est omniprésent dans le livre.
Il faut également parler de la bande-son : même s’il s’agit d’un livre, on pourrait facilement en faire un CD… Le rock a toujours parcouru l’œuvre de Virginie Despentes, mais en faisant du personnage principal de son roman un disquaire, elle s’en donne à cœur joie…
Bref, un vrai plaisir de lecture. Par chance, il reste encore 2 tomes à lire, en espérant qu’ils sont aussi bons…
L.G :
Je trouve que ce livre se lit bien, chacun des personnages a son propre style et cette diversité est plaisante au début puis je me suis lassée au fur et à mesure de la lecture. L’intrigue en relation avec les cassettes vidéos se noie dans les descriptions des tranches de vie, du coup le roman devient une simple superposition d’histoires. Je n’ai même pas eu envie de connaître la fin.
Effectivement, comme le note Evil.g, le livre aurait pu être un CD voir un coffret tellement il y a de nom d’artistes et de titre de morceaux ! Comme je ne connais pas cet univers musical, les références ne m’ont pas parlé et je trouve que cette profusion a accentué le fait que je ne suis pas rentrée dans le livre.
Virginie Despentes a réussi à me faire sourire, j’apprécie son écriture qui est aussi franche et crue que ses personnages, cependant aucun d’eux ne m’a touché, il n’y a pas d’émotion. Je trouve dommage que cette dimension ne soit pas présente dans le livre même si je comprends que la distance corresponde aux différentes personnalités cassées, déstructurées… C’est un peu comme regarder un film 3D sans lunettes.
Lancer un lynchage médiatique est plus facile que faire décoller un buzz positif – elle prétend qu’elle sait faire les deux, mais l’époque plébiscite la brutalité. Celui qui défonce est celui qu’on écoute – il faut toujours prendre un pseudonyme mâle pour malmener quelqu’un. Le seul son qui apaise les forcenés qui hantent les couloirs du Web, c’est celui du maton qui broie les os d’un codétenu. Trois commentaires dithyrambiques sur le pilote d’une émission, les internautes se méfient et flairent la manipulation, trente critiques délirantes d’hostilité et personne ne se pose de question. Et le badaud peut toujours se taper sur le ventre « à moi on ne me la fait pas », il a d’ores et déjà imprimé ce qu’on voulait lui transmettre. Le mépris se transmet aussi facilement qu’une gale.
On a vite su, dans Paris village, que cette fille pouvait dépanner. On l’invite à prendre un café, discrètement, dans des bars où on n’a pas l’habitude d’aller et où on ne craint pas d’être vu. Et on lui demande de déboîter un concurrent, un ami, un adversaire. Pour deux cents euros, elle casse une jambe virtuelle, pour le double, elle endommage une web réputation, et si on a le budget elle peut littéralement pourrir la vie de son prochain. Internet est l’instrument de la délation anonyme, de la fumée sans feu et du bruit qui court sans qu’on comprenne d’où il vient. Ce relou de Laurent Dopalet, justement, qui n’arrête pas de l’appeler depuis la veille, claque des fortunes improbables pour qu’elle défonce telle actrice qui n’a pas répondu favorablement à ses attentes, les collègues qui viennent ou qui risquent d’avoir du succès, les anciens associés qui lui ont tourné le dos… Il note beaucoup de noms sur sa liste noire et elle est sa sorcière vaudoue. Elle lui est devenue indispensable. Ils se rencontrent tous les mois.
Dopalet est entièrement dédié à sa propre personne. Il peut être amer, lucide, parfois drôle, à côté de la plaque ou délirant – il ne parle que de lui. Son ego est pourtant fragile – la moindre critique le blesse, une éraflure à sa réputation et la rage le cloue au sol. S’il entend à la radio qu’un collègue est complimenté, il le perçoit immédiatement comme une manière insidieuse de déclarer qu’il n’est qu’une merde. Dopalet lit la presse, regarde la télé, va sur Internet, et Dopalet souffre. Les comédiens sont mieux payés. Les réalisateurs sont plus considérés. Les distributeurs le ruinent. Le public veut sa peau. Tout le monde touche de l’argent public, sauf lui. Tout le monde s’amuse, tout le monde s’éclate, sauf lui, pauvre petit homme, qui travaille comme un acharné et qu’on remercie à coups de savates. Tout ça se déroule dans un deux cents mètres carrés avec vue sur la Seine, car il a épousé une femme extraordinairement riche, mais ça ne le console pas. Il souffre. Il est un excellent client. La Hyène est devenue indispensable à son équilibre, pour lequel il investit des sommes folles… Le prof de gym, le psy, l’hypnothérapeute, le prof de méditation, la masseuse, l’acuponcteur, la magnétiseuse, l’ostéopathe se disputent un butin mensuel confortable, et c’est à se demander, entre ses week-ends et ses maîtresses, quand Dopalet peut bien trouver le temps de travailler. Elle lui passe des factures exorbitantes. De ces années de dealeuse, elle n’a pas oublié que le toxico désire que le vendeur soit intraitable. C’est ce qui fait de lui un demi-dieu.
Elle s’est spécialisée dans le cinéma. Ça lui évite de se coltiner les contrats politiques, qui ne sont pas mieux rémunérés et réclament beaucoup plus d’efforts. Les films, en 2014, il n’y a que les professionnels que ça intéresse. Plus personne n’est prêt à perdre ne serait-ce que dix minutes à discuter d’un travelling, à défendre un thriller ou cramer un drame psychologique. Elle travaille souvent pour des actrices. Elles ne sont pas toutes mesquines et intéressées. Elles vivent dans l’insécurité et disposent de beaucoup d’argent. Bonne combinaison. Elles sont prêtes à payer pour qu’on sème sur Internet messages d’amour, photos, déclarations enthousiastes et témoignages vécus de combien elles sont abordables et classes, quand on les croise au café du coin. La plupart du temps, quand même, son rôle reste de descendre les concurrentes en lice pour un rôle qu’elles convoitent. Ou empêcher une petite nouvelle de monter trop vite. Pour le plaisir. Les conflits d’intérêts viennent vite : peut-on prendre une cliente alors qu’on est justement occupée à la détruire pour une autre cliente ? Bien sûr qu’on peut. C’est le troisième millénaire, tout est permis.
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