Au détour d'un livre

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Les affreux de l'histoire, sous la direction de Bruno Fuligni

 

Résumé : Durs envers les faibles, souples devant les puissants dont ils convoitent la place, prêts à tous les reniements pour avancer et dépourvus de la plus élémentaire dignité, les affreux de l'histoire ont bien des points communs. Qu'importe la défroque ou la justification idéologique, tous profitèrent des faiblesses de leurs semblables pour les réduire à un état de servitude et d'avilissement extrêmes. Corrompus, cyniques et débauchés : voici les pires crapules de l'humanité, de l'Antiquité à nos jours.

Auteur : Collectif, sous la direction de Bruno Fuligni
Nombre de pages : 304
Édition : First
Collection : Historissimo
Date de parution : 16 mai 2019
Prix : 18.95€ (Broché) - 11.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2412037539

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Avis / Critique :

 

Bruno Fuligni embarque ses amis férus d'histoire pour nous raconter quelques portraits d'affreux qui ont traversé les siècles. Si certains ont tué, d'autres ont été des serials violeurs ou même arnaqueurs. A chacun son affreux et c'est ce qui nous donne des chroniques quelque peu inégales, mais néanmoins intéressantes.

On commence donc par la famille des Ptolémée (les pharaons de la dynastie grecque) où le mariage consanguin laisse place au complot familial. C'est à celui qui tuera l'autre en premier. Ptolémée VIII, surnommé non pas le bienheureux, mais le "bouffi malfaisant", fait trucider son neveu, jeter à la mer ses victimes enfermées dans un cercueil de plomb, assassiner son propre fils qu'il envoie démembré à la mère en guise de cadeau d'anniversaire. Tout un programme.
Nos conteurs passent ensuite à une autre crapule, un peu plus soft avec Pierre Cauchon, celui qui envoya Jeanne d'Arc sur le bûcher. Viennent ensuite tour à tour, César Borgia, évêque à 15 ans, cardinal à 17 qui fait tuer son aîné, puis l'amant de sa sœur, son beau-frère. Bref, en voilà un qui fait plutôt dans l'entreprise familiale.
Vous découvrirez par la suite un violeur en série, Thomas Thistlewood, planteur de la Jamaïque qui tyrannisait sexuellement ses esclaves et celles des autres ; le magistrat de la terreur, le dénommé Fouquier-Tinville qui envoya à la guillotine plus de 2400 contre-révolutionnaires ; Pierre Belhomme qui n'a de beau que le nom mais qui se révéla être une fripouille en faisant commerce de la détresse des autres durant la Terreur ; Le maréchal de Saint-Arnaud, qui fit tuer autant les militaires, que les femmes et les vieillards en Algérie ; Pierre Merlou, le maire puis ministre des finances, tripoteur de jeunes filles qui aura droit aux belles pages de Colette dans "Claudine à l'école" sous les traits du docteur Dutertre ; Georges-Anquetil, empereur des maîtres chanteurs et escroc  ; Beria, le bourreau de Staline qui n'hésitera pas à dresser des listes de gens à tuer alors qu'il n'a que 21 ans et coordonnera le programme nucléaire russe ; un autre Russe avec Andreï Jdanov, lecteur et tueur vorace, chouchou de Staline qui fera passer de vie à trépas quelques milliers de Russes ; Pierre Bonny,  policier escroc à qui on devra l'affaire Seznec ; Louis Darquier de Pellepoix, vichyste et antisémite convaincu surnommé le "Perroquet d'Hitler" qui passe son temps à faire des listes de juifs à expédier dans les camps et à qui on devra la malheureuse rafle du Vel'd'Hiv orchestrée par Bousquet ; J. Edgar Hoover, le patron du FBI a lui aussi droit à quelques pages de ce livre pour son côté tyran, raciste, maitre-chanteur, homophobe.
Cette sélection se termine par le gourou Jim Jones, qui enverra au ciel 900 de ces adeptes en les empoisonnants.

Voilà donc la liste de ces affreux de l'histoire que vous pourrez trouver dans ce livre. Certains sont connus comme Borgia, Hoover, d'autres moins ou pas du tout et c'est là le plus intéressant somme toute.
La brochette, malheureusement ne s'arrête pas là et nul doute que Fuligni et ses acolytes ne tarderont pas à nous faire une suite, car il y a pléthore de noms à y mettre.
 

Bref, par le biais de la petite histoire, de l'anecdote, voilà un livre qui nous narre les portraits de ces Affreux de l'histoire. Quelques traits d'humour parsèment le contenu qui se lit assez rapidement.

 

 

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Extrait :

Ptolémée VIII Évergète
182-116 av. J.-C.

Lorsque s’ouvre le IIe siècle avant notre ère, cela fait cent cinquante ans que l’Égypte vit sous le règne des Lagides, ainsi nommés parce qu’ils descendent de Lagos, général de Philippe de Macédoine, le père d’Alexandre le Grand. Installés dans leur capitale Alexandrie, une ville grecque, ils dominent la moitié du bassin méditerranéen, tournant le dos à l’arrière-pays, comme dans un orgueilleux et splendide isolement. Cependant, les facteurs de déclin s’accumulent bientôt. Les historiens antiques estiment qu’après le troisième Ptolémée, les rois lagides ne sont plus que des incapables. Le plus remarquable de cette lignée de monstres est le huitième souverain, resté dans les mémoires comme « le Bouffi malfaisant ».

En l’an 181 av. J.-C., le roi d’Égypte Ptolémée V Épiphane meurt, à l’âge de 30 ans, peut-être empoisonné par ses courtisans. Les Égyptiens ne le pleurent pas. En effet, contrairement à ce que proclame son nom de règne – l’Illustre, en grec –, ce passionné de chasse, incapable, jouisseur et cruel,

n’a guère brillé. Battu par ses voisins, le Lagide a perdu ses possessions extérieures d’Asie Mineure et de Cœlesyrie.

Ne lui restent plus que Chypre et Cyrène, dans le nord-est de la Libye actuelle. Discrédité, Épiphane s’est ensuite borné à écraser dans le sang les nombreuses révoltes de ses sujets de Haute-Égypte.

Le Bienfaisant

Après un règne aussi lamentable, il est urgent de tourner la page. Sa veuve, Cléopâtre Ire, assure la régence, au nom de leur fils aîné, Ptolémée VI, âgé de 3 ans et proclamé dieu-roi sous le nom de Philométor, « Celui qui aime sa mère ». Comme l’usage permet aux Lagides ce qui est interdit aux simples mortels, la cour unit le bambin à sa sœur Cléopâtre II, qui a à peu près son âge… Personne ne se soucie encore du benjamin de la fratrie, un beau bébé joufflu, si l’on en juge d’après ses bustes.

Sur le moment, tout se passe bien, car la régente gouverne sagement. Hélas, elle décède prématurément en 176 av. J.-C. Un trio de ministres incapables lui succède et ne trouve rien de mieux que de déclarer la guerre au royaume voisin de Syrie. Mal leur en prend, le conflit tourne à la catastrophe : le roi de Syrie envahit l’Égypte et capture Ptolémée VI. Paniqués, les Alexandrins le déclarent déchu et proclament roi son frère cadet. Celui-ci prend le nom d’Évergète, « le Bienfaisant ». Le joufflu n’a même pas une douzaine d’années. Il ne quittera plus la scène.

Après de multiples péripéties, en 168 av. J.-C., les Romains volent à la rescousse des Lagides et somment le roi de Syrie de se retirer. C’est le célèbre épisode dit « du cercle de Popilius Laenas ». Rencontrant le souverain syrien dans un faubourg d’Alexandrie, le Romain brandit un courrier du Sénat lui intimant d’évacuer l’Égypte. Interloqué, le roi répond qu’il doit d’abord consulter ses conseillers. Le général trace alors avec sa canne un cercle et lui déclare qu’il n’en sortira pas avant d’avoir répondu. La rage au cœur, le Syrien obéit, non sans avoir pillé l’Égypte de fond en comble.

Soulagée mais perplexe, la capitale se retrouve avec deux rois : Philométor et Évergète. C’est un de trop et le cadet donne déjà toute sa mesure en tentant d’assassiner son aîné. Les Alexandrins finissent par imposer un règlement au trio infernal : les dieux Philométor, Ptolémée VI et Cléopâtre II régneront en Égypte, tandis que le Bienfaisant s’en ira gouverner Cyrène. Une belle ville certes, mais un peu éloignée de tout.

Pendant quinze ans, Évergète y ronge son frein, prétendant un moment à la main de Cornélie, la mère des Gracques à Rome. Non qu’il ait une inclinaison particulière pour cette femme célèbre par sa vertu, mais parce qu’il pense par ce moyen se concilier une partie du Sénat. Ce calcul échoue et il doit patienter jusqu’à la mort accidentelle de son frère aîné, en 145 av. J.-C. Beau, courageux et bon administrateur,

Philométor a succombé à une chute de cheval en guerroyant en Syrie.

Cléopâtre II proclame roi son fils Ptolémée VII Néos Philopator, mais, comme il est mineur, les Alexandrins exigent le retour d’Évergète, même si certains appréhendent son mauvais caractère : tout plutôt qu’une régence hasardeuse… La rage au cœur, Cléopâtre II s’incline et, pour sceller le nouveau pacte familial, accepte d’épouser son frère cadet. La suite est malheureusement logique : le soir des noces, Évergète ordonne la mort de son cher neveu… Cléopâtre II serre les dents et donne un fils à son frère-époux, durant les fêtes du couronnement à Memphis – d’où le nom de Ptolémée Memphitès donné au bébé.

Frère-oncle-époux

Comme Évergète se doute que sa sœur tentera de l’éliminer en mettant l’enfant sur le trône, il a l’idée de la neutraliser en épousant sa nièce, proclamée reine sous le nom de Cléopâtre III Évergète. La manœuvre, géniale, réussit au-delà de toute espérance : Cléopâtre II et Cléopâtre III, la mère et la fille, se livrent désormais une guerre acharnée, sous l’œil gourmand du frère-oncle-époux. Grâce à cette guérilla familiale, Évergète est paradoxalement à peu près tranquille.

Pour narguer sa mère et renforcer sa position, Cléopâtre III se met gaillardement à l’ouvrage et donne six enfants en douze ans à son oncle-époux. Ces petites vipères grandissent pour l’instant

tranquillement dans la pouponnière royale. Puisque le fils de Cléopâtre II, Memphitès, est né durant les célébrations de Memphis, Cléopâtre III riposte en déposant solennellement son propre fils aîné devant la réincarnation du taureau Apis. Le calcul n’est pas sot : la dynastie lagide, déclinante et à court d’argent, doit à tout prix se concilier ses sujets égyptiens, au premier rang desquels le clergé, ses scribes et ses collecteurs d’impôts. Détail révélateur : si Évergète couvre ses formes obèses de fines tuniques de lin transparentes, il ne faut pas y voir, comme le font les Romains, une excentricité dégoûtante, mais un retour à l’habit des pharaons.

Cette égyptianisation de la dynastie s’accompagne cependant de son affaiblissement à Alexandrie. Consciente de sa force, la capitale nargue les Lagides, dans une atmosphère de kermesse révolutionnaire permanente. Même s’il est reclus dans le somptueux quartier du palais, qui donne directement sur le port et fait face au phare, le trio n’ignore pas les grondements de la foule. Non loin de là, la dépouille embaumée d’Alexandre le Grand, qui repose dans son splendide mausolée, semble veiller sur la famille royale. Mais pour combien de temps encore ? Les Alexandrins tournent en dérision les noms glorieux de leurs souverains : Cléopâtre II devient « la Vieille », Cléopâtre III « la Connasse »… Quant à Ptolémée VIII, c’est pire encore : d’Évergète, « le Bienfaisant », il devient le « Cacergète », c’est-à-dire « le Malfaisant ».

Ses formes de plus en plus volumineuses, résultat de sa vie de débauche, lui valent l’épithète de Physcon : « le Bouffi »… Dans ses Histoires philippiques, Justin force le trait : « Il était laid et de petite taille, et son ventre chargé de graisse le faisait ressembler à une bête plutôt qu’à un homme. » Bientôt, cette masse de chair, sorte de gélatine tremblotante, n’arrive plus à marcher. Ce qui n’empêche pas la monstrueuse grenouille d’entretenir un véritable sérail, où brille sa concubine Irène, mère de son bâtard Ptolémée Apion. Résultat, l’opinion le surnomme aussi Tryphon : non pas « le Magnifique », comme le prétend la propagande officielle, mais « le Jouisseur » ou « le Tripoteur ». Quand les lazzis fusent trop près de ses oreilles, le Bouffi se fâche. Le mérou se transforme alors en murène, faisant jeter à la mer ses victimes, enfermées dans des cercueils de plomb.

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