24 Mai 2021
Auteur : Michel Onfray
Nombre de pages : 624
Date de parution : 2010
Editeur : Grasset
Prix : 22, 40 euros (broché) - 8.49 euros (epub) - 8.10 euros (poche)
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Résumé :
Michel Onfray, cohérent avec lui-même, s'en prend ici à une religion qui, bien plus que les monothéismes qu'il pourfendait dans son Traité d'athéologie, semble avoir encore de beaux jours devant elle. Cette religion, c'est la psychanalyse - et, plus particulièrement, le freudisme. Son idée est simple, radicale, brutale : Freud a voulu bâtir une « science », et il n'y est pas parvenu; il a voulu « prouver » que l'inconscient avait ses lois, sa logique intrinsèque, ses protocoles expérimentaux - mais, hélas, il a un peu (beaucoup ?) menti pour se parer des emblèmes de la scientificité. Cela méritait bien une contre-expertise. Tel est l'objet de ce travail.
Avis / Critique :
S'attaquer à Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, il fallait oser !
Michel Onfray l'a fait et sans retenue, avec une verve digne du chevalier de Pardaillant partant faire cingler au vent son épée ajustée de mots.
Zip, zip, la lame de la plume d'oie s’étale sur le papier et déverse son fiel. Oyé, oyé, représentants de la dite sainte-mère psychanalyse, voici le portrait de votre créateur, non pas le duc de Guise mais l'odieux Freud, pervers et incestueux.
Consultez mon livre, ce pavé gros comme une mare (à moins que ce ne soit une lessiveuse...) et jugez de mon courroux et de ma vindicte à l'égard de celui que j(honnis profondément !
Ah, ouvrir un livre de Michel Onfray, c'est se dire que l'on va passer un bon moment. Certes oui, il le fut mais comique, je n'en attendais pas autant.
Le mot est beau, la phrase puissante, le livre digne d'un roman de Dumas (Alexandre pas Roland) qui se serait égaré en feuilletonnant un peu trop son ouvrage. Le héros ? Freud, Sigmund Freud, autrichien originaire de Galicie, fils et petit-fils de commerçants juifs.
Mais que reproche donc notre philosophe à cet homme qui a inventé une certaine technique thérapeutique ?
Ah, là est la question ! Allez, lançons-nous, n'ayons pas peur.
1- D'avoir étouffer la philosophie et de l'avoir faite simplement disparaitre (ah zut ! Monsieur Onfray aurait-il donc menti et ne serait pas philosophe cette divine discipline ayant disparue du fait de l'autrichien pervers ? Malheur, il y a tromperie sur la marchandise, alors ! )
2- D'avoir piqué les idées de Nietzsche et de Schopenhauer, du moins de s'en être inspiré et de n'avoir pas rendu à César ce qui était à César. Mais Nietzsche et Schopenhauer ont-ils inventés cette même psychanalyse ?
Certes non, même s'il est juste de reconnaitre, oui, oui, je m'incline sur ce fait, qu'ils en ont tissé certaines idées, reprises et surtout améliorées par Freud, himself (comme Léonard de Vinci a amélioré certains travaux de Valturio pour en faire des machines fonctionnelles. Doit-on alors enlever son génie à De Vinci ?)
3- De rêver d'avoir un jour une plaque en marbre qui dirait "ici, le 24 juillet 1895, le système de rêve fut révélé au Dr Freud". Mon dieu, mais quel narcissisme !
Que dire de notre philosophe quand il aura un jour une plaque, le nom d'un collège, d'un lycée, une rue à son nom, sera-t-il capable de se livrer à un brûlot qui dira "Onfray réfute Michel Onfray, philosophe de tout et surtout philosophe de rien ?" Et que dire de tous les autres, ces gens qui ont une plaque sur le fronton des murs de nos rues ? Ah,... Michel, comme tu as dû avoir mal !
4- Freud n'est pas un scientifique (Ah ! double malheur mais le dit chevalier pourfendeur à la plume d'oie rappelle plus tard dans ce même livre que l'autrichien est bien scientifique et non philosophe. Puis les deux puis plus rien. Allons, bon... on s'y perd !)
Mais n'était-il pas neurologue, en fait ? Ah oui... c'est vrai, c'est ça.
5- Freud a mis enceinte sa belle-soeur puis l'a obligée à avorter. Est-il besoin de rappeler à monsieur Onfray qu'à l'époque supposée des faits (1923, tel qu'il le dit), la dite belle-soeur (toute belle qu'elle fut, désirable, baisable et ovarienne au taquet) fêtait tout juste ses 58 printemps... L'archange Michel (oui, le même, il faut croire) avait donc encore frappé après la vierge Marie...à moins que ce ne fut Moïse ou alors, allons plus loin, la divine nouvelle science de la PMA (procréation médicalement assistée) ?
Mais arrêtons-là, le pourfendeur à l'épée à présent bien mal ajustée n'a plus qu'à s'incliner. Certes, il lui reste une idée. Celle qui le dérange en fait le plus dans son essai à épisodes. J'en viens à citer le mot de trop : philosophie !
La psychanalyse aurait-elle été reconnue par son créateur comme une branche de la belle discipline et hop, plus de brûlot. Papa Freud serait rentré dans le rang et serait même porté par notre auteur sur l'autel de la sainte mère Philien-Sophia (Philosophein qui donna Philosophie).
Son tort serait-il donc là ? D'avoir rejeté d'une certaine manière cette discipline si chère à Onfray (qui ne peut être philosophe puisque celle-ci a disparue à cause de Freud, voir le 1-, vous me suivez ?)
Alors voilà, on casse du Freud comme on casserait des noix. Ah oui, le docteur barbu n'était pas un homme parfait (cocaïnomane durant 10 ans avant d'en reconnaitre les méfaits - rappelons quand même l'époque, début 20ème. La cigarette n'était pas considérée comme nocive en 1950, non plus...), il n'aimait pas son père, il adorait sa mère (qui l'adorait en retour - d'où la découverte du complexe œdipien, vous suivez toujours ?), il avait des pensées incestueuses envers sa fille Anna (dont le prénom serait tiré tour à tour du cas Anna O. ou de la tante Anna, soit l'anti-sophie, autre fille de Freud et donc anti-philosophie par déduction et tropisme incestueux, là encore pour Onfray), c'était un homosexuel refoulé n'acceptant pas son amour pour Fliess (Freud dira qu'il a sublimé sa passion pour son ami), c'était un menteur, un dissimulateur et un hypocrite, Freud détestait Nietzsche (mais envoie quand même deux psychanalystes rendent visite à la soeur éplorée par la mort de son frère. Oui mais la soeur de Nietzsche était une garce qui a travesti les travaux de son frère...Allons bon).
Bref, à écouter Michel Onfray, Freud a tout du mécréant et a tout piqué à Nietzsche sans rien lui rendre en retour et donc de ce fait, la psychanalyse devient affabulation car elle n'est pas justifiée par l'empreinte de la sacro-sainte philosophie qui serait donc la seule à prétendre connaitre l'être humain et les perceptions de celle-ci (tiens, mais n'est-ce pas ce qu'il reproche en fait à la psychanalyse ?)
J'oublie de dire que Freud serait antisémite et ami avec Goebbels (pour un juif, c'est amusant d'autant que ses soeurs sont passées dans les fours). Le mécréant a été jusqu'à dédicacer un livre à Mussolini en 1933 ! (Onfray ne paraphe-t-il pas ses propres livres lors de salons et connait-il donc tous ceux qui viennent le voir et lui demande une dédicace ? )
Onfray se dresse donc durant tout son brûlot (bien écrit et intéressant, je le reconnais) comme le pourfendeur qui doit rendre justice, tel(le) Jeanne d'Arc, à son père spirituel, Nietzsche contre le mauvais élève, emprunteur, correcteur, créateur, tueur de père "spirituel" Freud qui doit être dès lors détruit, vilipendé, déboulonné, brûlé, assassiné, en place publique avant que l'humanité n'en vienne à devoir oublier son nom et sa création, la vilaine psychanalyse qui oblige à se regarder en face et à se comprendre sans avoir à se tourner vers la philosophie, science universelle et unique aux yeux de notre chevalier-auteur.
Mais ce livre, monsieur Onfray n'est-il pas au fond votre propre peur d'accepter d'affronter en séance ce qui vous dérange et donc de découvrir un visage de vous qui ne serait pas celui que vous vous obstinez à nous afficher : celui qui n'aime rien, qui rejette tout hormis lui-même ?
Je rappelle qu'un temps, Onfray a pensé lui-même à devenir psychanalyste mais peut-être devoir passer 5,7, 10 ans sur le divan avant d'analyser à son tour lui a-t-il paru un tantinet trop long... (on met moins de temps à devenir prof de philo, c'est sûr d'où son envie de voir des formations en trois, quatre mois (voir les cours de l'université libre)).
Les psychanalystes se font payer uniquement en argent liquide pour fuir le fisc ? Ah ! tiens, c'est drôle, j'en connais qui prennent non seulement les chèques et se font payer 55 euros l'heure mais payent aussi la tva à 20% (non mais, ils sont vraiment nuls ceux-là...). On est donc loin des 450 euros annoncés par Onfray !
La psychanalyse est bonne sauf si elle est Freudienne et ne doit donc être que post-Sartrienne (ah, la psychanalyse de Sartre, je l'attends celle-là. Oui, oui monsieur Onfray, j'avoue, je ne la connaissais pas. Sartre, mentor de la nouvelle psychanalyse, voir post Onfray !, alors là, je tombe des nues)
Allez, j'arrête... parce qu'à trop me marrer, je vais finir par me décoller un poumon.
La psychanalyse n'est pas parfaite loin de là, elle est modifiable (Lacan, Jung, Rank, Dolto et la suite viendra) et Sigmund Freud, son découvreur n'est, n'oublions pas, qu'un homme qui a tâté longtemps, cherché souvent, fais des erreurs (n'ayons pas peur de le dire oui, c'est vrai !) comme tout un chacun et qu'il faut savoir le garder à sa place d'homme et non de "mythe" tout puissant. Mais la psychanalyse peut aider en écoutant, en analysant, en permettant de dire, de s'autoriser à parler sans censure et n'est-ce pas là le plus important ?
De quoi est-on jaloux, monsieur Onfray ? Il est facile de se donner le rôle du pourfendeur et de jeter tout ce qui vous dérange au rebus pour ne garder que ce qui vous va bien.
Malgré tout, je veux reconnaitre que Michel Onfray aurait pu rendre son livre plus intéressant s'il avait été moins cassant, plus juste, moins truffés d'erreurs (ce qui est un comble pour quelqu'un qui cherche l'irréprochabilité chez l'autre), d'interprétations sans fondements, de contre-avis.
A décharge, je dirais qu'il me parait intéressant de devoir le lire car, même en étant un brûlot plein de haine, il apporte un regard nouveau sur la perception de la psychanalyse et permet de passer de vrais bons moment de rigolade (si si).
"Le crépuscule d'une idole" est donc, comme les autres, un livre sorti de notes de lecture et surtout de camions remplis de contradictions qui se ramassent malheureusement à la pelle (et c'est bien dommage car, il y a là une belle plume d'écrivain. Oui, oui, je suis fan et j'expie ce côté de ma personnalité. Je me flagelle tous les vendredis de branches d'oliviers, depuis)
Le must que j'attends avec impatience serait donc quand même que vous écriviez un jour "Onfray déboulonne Onfray". Ah, voilà un brûlot qui serait des plus intéressant et auquel j'adhèrerais sans contestations.
Quoique...
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Extrait :
"Je sortais en effet de 4 années passées dans un orphelinat de prêtres salésiens, dont certains étaient pédophiles, et les livres, déjà, m'avaient sauvés de cet enfer dans lequel on ne sait pas si, le lendemain, on n'aura pas descendu une marche de plus vers l'infamie. Je fus l'habitant de cette fournaise vicieuse entre 10 et 14 ans, l'âge de mon retour à la vie. Entre deux cours de ma 1ère année au lycée, 1973, je passais donc sur le marché et emportais dans mon cartable des poètes et des écrivains, des biographies et de la sociologie, de la psychologie et de la philosophie"
"Freud proclame donc haut et clair qu'il n'est pas philosophe. Qu'il n'aime pas la philosophie. Qu'il est un homme de science. Or, l'inventeur de la psychanalyse n'est pas plus scientifique que Shakespeare ou Cervantès, pour citer deux de ses auteurs préférés. Que cela lui plaise ou non, Freud est un philosophe élaborant des vérités prétenduments universelles avec ses intuitions."
"Freud, la psychanalyse, les psychanalystes restent intouchables car la doctrine leur offre un statut d'extraterritorialité intellectuelle. Freud prend pour une offense personnelle toute remise en cause de la moindre de ses thèses. Comment pourrait-il en être autrement avec une personne ayant fait clairement savoir que sa vie se confondait à la psychanalyse, qu'elle s'y identifiait, qu'elle était son enfant, sa créature, sa création , Le docteur viennois prétendument débarassé de sa psychonévrose fort grave en a fait un objet fusionnel. Ses disciples se prosternent depuis un siècle devant le même totem devenu tabou. Or la tâche du philosophe n'est pas de se prosterner devant les totems."
"Les 21 et 22 septembre 191, un congrès de psychanalystes se réunit à Weimar. Deux d'entre eux, Sachs et Jones, rendent visite à la soeur de Nietzsche. Le pélérinage à Elisabeth Förster-Nietszche ne se sera pas fait sans l'assentiment de Freud qui, lui, n'effectuera pas le déplacement à la Villa... Voici donc deux apôtres du freudisme rendant visite à l'une des plus grandes faussaires de tous les temps ! En effet, cette femme a tout fait pour envoyer son frère dans les bras du national-socialisme à coups de falsifications, de mensonges, de malfaisances, dont la publication de La volonté de puissance, un faux en bonne et due forme destiné à construire la légende d'un Nietszche antisémite, belliciste, nationaliste prussien, pangermaniste, célébrant la cruauté, la brutalité et l'absence de pitié..."
A lire dans ce site, du même auteur : La passion de la méchanceté, sur un prétendu divin marquis
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