15 Janvier 2019
Résumé : On vit aujourd'hui de plus en plus longtemps, avec le risque de ne pas pouvoir demeurer chez soi et de devoir entrer en maison de retraite. Une décision difficile pour les personnes âgées, d'autant que l'on connaît mal cet univers. Entre les inquiétantes idées reçues et l'excès d'optimisme de certaines images, on oublie qu'il s'agit avant tout d'une communauté humaine.
Auteur : Claudine Badey-Rodriguez
Préface de Marie de Hennezel
Nombre de pages : 252
Edition : Albin Michel
Collection : Comment faire face
Date de parution : 3 janvier 2003
Prix : 18.50€ (Broché) - 10.91€ (occasion)
ISBN : 978-2226136237
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Écrit en 2003, le livre "La vie en maison de retraite" est toujours d'actualité. Voilà un ouvrage qui permet au personnel soignant ou aux autres comme les familles, les étudiants, de comprendre comment se passe la vie dans une maison de retraite ou du moins comment chacun la perçoit et la vit.
Claudine Badey-Rodriguez entame son ouvrage par le biais de l'arrivée d'une résidente, Mme Rodriguez, une femme de 90 ans dont on partage les pensées. Celle-ci nous narre son arrivée, sa perception des lieux, son inconfort, sa perte d'autonomie, sa non-compréhension de ce qui lui arrive et pourquoi elle arrive en maison de retraite ; les autres résidents bien différents d'elle ; la non-écoute ; l'aliénation ; la prise en charge ; l'infantilisation ; le manque de repère ; les nouveaux repères à prendre ; les intrusions dans l'intimité (voulues ou non), etc.
Nous suivons ensuite les pensées de la fille de cette même Mme Rodriguez et celles d'une infirmière. Chacune a sa perception de l'environnement, des personnes, des faits, du lieu.
Ce livre permet de se mettre dans la peau d'une retraitée, à la démence qui arrive et de percevoir son inconfort, son interrogation vers cette nouvelle vie qui l'attend, au milieu de personnes inconnues, loin de chez elle, déracinée.
Car nous l'oublions trop facilement, c'est un déracinement pour les personnes âgées qui se retrouvent souvent (mais pas toujours) contre leur gré dans ce genre d'établissement où leur autonomie ne sera plus la même (plus de choix de repas, une simple chambre pour lieu de vie, plus de sorties ou presque). Quelles sont alors leurs perspectives ? Leurs droits ? Leurs envies ?
Et comment le vivent les autres, ces autres qui sont leur famille, le personnel soignant?
Au travers de la plume de la psychologue qui partage avec nous ces doutes, ces histoires de vie, ces témoignages, ces rencontres, c'est tout un monde qui se dessine et ses interrogations avec.
Qu'en est-il par exemple de la sexualité de la personne âgée en institution ? Est-ce tabou ou non ? A-t-on le droit de ne pas être parfait face à certains comportements ? Comment les gérer, comment détecter les indices de la souffrance d'autrui quand celui-ci ne peut plus s'exprimer, comment lui apporter un peu de chaleur humaine ?
Autant de questions qui sont dans ce livre "La vie en maison de retraite" exposé au travers des témoignages de la famille, du personnel soignant, et de Claudine Badey-Rodriguez qui pose le tout et tente d'apporter des réponses à travers sa propre pratique.
Un livre humain, facile d'accès, mais aussi didactique, nécessaire à lire pour tous ceux que cela concerne.
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J'arrive pas à m'endormir. Ce lit est trop petit. Depuis que je me suis mariée, je n'ai pas dormi dans un petit lit. Et puis il est trop tôt.
La nuit tombe petit à petit. Ça me fait peur. Je ne connais pas ici. Si j'ai besoin de me lever, comment je vais faire ? Ma maison me manque... mon chat... je ne sais même pas ce qu'ils en ont fait de ma Mimine... les bruits de ma rue... le bonsoir de ma voisine, ça fait si longtemps qu'on se connait ; elle doit se demander ce qui m'est arrivé, je n'ai même pas pu la prévenir. Et si quelqu'un me téléphone à la maison ? Moi qui étais toujours là, ils vont croire qu'il m'est arrivé un malheur. Remarque, c'est vrai que c'est un malheur de me retrouver là.
Y'a quelqu'un qui crie, ça fait peur ce cri, j'en ai jamais entendu des comme ça.
J'ai envie de pleurer... je n'arrive pas à me retenir... me retrouver toute seule ici... même pas Mimine pour me consoler. Qu'est-ce que je vais devenir ? Je voudrais mourir. Ça dure trop longtemps la vieillesse quand on ne peut plus faire les choses comme avant. Les jeunes ne se rendent pas compte. Et puis c'est eux qui décident pour vous. Je ne suis pas folle tout de même !
C'est sûr que je ne veux pas rester là. Je m'en fiche de mourir, mais je veux être dans ma maison.
Oh la la, maintenant j'ai envie de faire pipi. Je sais même plus où sont les toilettes. je me rappelle pas s'il y en a dans la chambre. Je ne vois rien, je peux même pas chercher. Y a bien la petite veilleuse, mais je n'y vois pas assez. Je vais essayer de me retenir.
Je peux plus maintenant ; il faudrait peut-être que je sonne ? Mais dans les hôpitaux, ils aiment pas trop être dérangés tout le temps, ça doit servir que si on ne se sent pas bien. Tant pis, ça doit bien arriver à d'autres que moi d'avoir envie de faire pipi la nuit. Voilà, j'ai trouvé la sonnette.
Une dame arrive avec une lampe de poche.
- Qu'est-ce qui vous arrive ?
- Je voudrais aller aux toilettes.
- Vous avez une couche, faites dans votre couche !
Et elle repart !
Ça serait vraiment une couche qu'ils m'ont mise, et pas une serviette hygiénique ? Mais pour qui ils nous prennent ? On a passé l'âge depuis longtemps d'avoir des couches . Si encore je pouvais pas me lever, je comprendrais... et encore, il existe les bassins quand même!
Si au moins je savais où sont les WC, j'irai toute seule. Je ne sais même pas où est la lumière dans cette chambre. Essayer de me retenir jusqu'à demain ? Non, je ne peux vraiment pas. Mais je ne vais tout de même pas faire dans une couche ! A mon âge ! Tant pis, je vais essayer de trouver les toilettes toute seule. Où est-ce que je vais aller ? Je vais bien rencontrer quelqu'un à qui demander, il est pas tard.
Ouh, j'ai les jambes qui tremblent, elles me tiennent pas... je m'accroche au lit, mais si je le lâche, je crois bien que je vais tomber. Non, je n'y arrive pas. Je vais me recoucher et essayer de me retenir, tant pis...
Non, je ne peux plus ! Je vais resonner, après tout, ils sont là pour ça ! Et peut-être que tout à l'heure, la dame ne m'a pas bien comprise. J'attrape la sonnette. Cette fois, c'est un monsieur qui vient. Décidément, j'arrive pas à m'y reconnaitre avec tout ce personnel.
- Bonsoir madame Rodriguez, vous avez besoin de quelque chose ?
Celui-là au moins il est poli.
Je recommence comme si j'étais à l'école et qu'il fallait que je demande à la maîtresse. Ça me rappelle d'ailleurs un souvenir, c'est drôle ça, j'ai pas complètement perdu la mémoire. J'étais petite, j'avais 6 ans, je crois, et ma mère me faisait prendre des cours, et je me souviens elle était très méchante. Un jour, j'ai pas osé lui dire que j'avais envie de faire pipi ; je me suis retenue, retenue, retenue, et j'ai fini par me faire dessus. Quelle horreur ! Quelle honte ! Ça, je m'en souviendrai toute ma vie, enfin si je perds pas trop la boule. Eh ben là, c'est pareil, la même honte...
- J'ai envie de faire pipi. J'ai essayé de me retenir, mais je n'y arrive pas. Je m'excuse de vous déranger.
- Mais je vous en prie, madame Rodriguez, venez, je vais vous aider.
C'est pas possible, l'autre elle avait pas dû comprendre ce que je lui ai dis. En tout cas, lui il est gentil. Il me dit que ça ne doit pas être facile au début, quand on se retrouve là. En plus, la maison est grande.
- On es là pour vous aider. N'hésitez pas à demander quand vous avez besoin de quelque chose. J'espère que vous allez bien dormir maintenant.
- Excusez-moi, je peux vous demander comment vous vous appelez ?
- Moi, c'est François, je ne fais que les nuits. Mais vous verrez, tout le monde est très gentil ici, et on va bien s'occuper de vous. Allez, bonsoir madame Rodriguez.
- Bonsoir, et merci beaucoup.
Tout le monde est très gentil qu'il dit. Ça, c'est à voir. Peut-être qu'il ne connait pas tout le personnel s'il n'est là que de nuit. J'ai quand même pas osé lui dire que j'avais déjà sonné une fois, et je lui ai pas demandé pour la couche si c'était vraiment ça. J'ai eu peur de passer pour une imbécile.
Enfin, ça va mieux. j'ai bien cru qu'il allait falloir que je fasse pipi au lit.
Je suis déjà dans un demi-sommeil quand j'entends un grincement de porte. j'aperçois une ombre, mais personne ne me parle. Je commence à avoir peur. L'ombre s'approche... Je ne fais pas un geste, comme si je dormais. Ça y est, elle est près de mon lit : c'est une dame en chemise de nuit. Elle s'assoit sur mon lit, puis se couche à côté de moi. Je suis terrorisée. Elle marmonne quelque chose, mais je ne comprends rien et, heureusement, elle se lève et s'en va. J'ai le cœur emballé, les mains qui tremblent ! Quelle frayeur ! Mes enfants ont intérêt à venir me chercher demain !
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