5 Août 2015
Résumé : Comment aborder la psychologie jungienne, objet de tant d'opprobres et de passions, sans dénaturer un parcours intellectuel original ? De sa complicité puis de sa brouille avec Sigmund Freud, jusqu'à la découverte déterminante du Yi King, des archétypes et de la permanence de l'archaïque, cet ouvrage retrace fidèlement tous les tours et détours de la pensée jungienne.
Auteur : Christian Gaillard
Nombre de pages : 128
Edition : Presses universitaires de France (PUF)
Collection : Que sais-je ?
Date de parution : 2001
Prix : 9 euros - Occasion ; 2.95 euros
Avis / Critique :
Pas de "Que sais-je" sur la psychanalyse sans aborder l'un de ses principaux courants, le jungien et donc celui de son fondateur, Carl-Gustav Jung. Psychiatre, fils, cousin, neveu de pasteurs (11 dans sa famille), petit-fils d'une descendante de huguenots français, Jung est un enfant solitaire, amoureux de la nature, en proie à de nombreux évanouissements, syncopes, envies de suicide. Ses deux rêves qu'il conte dans son autobiographie, le rêve du "Phallus souterrain" et de la scène "de la cathédrale de Bâle" lui font prendre conscience du monde étrange qui se trame dans le cerveau humain. Brillant étudiant à l'université où l'ombre de Nietsze qui y a professé quelques années plus tôt plane encore, Jung devient l'assistant à 25 ans d'Eugène Bleuler. Psychiatre lui-même, Carl Gustav Jung ouvre en 1905 un laboratoire de psychopathologie expérimentale et rencontre Freud, deux ans plus tard. C'est le premier à traiter de la démence précoce, la schizophrénie, et confirme que l'oubli est un effet du refoulement. intéressé par les complexes de chacun, il professe que ceux-ci sont la voie royale vers l'inconscient. En effet, pour Jung pas de complexe sans refoulement. Le complexe-moi est pour lui, une unité plurielle et composite du Moi dont l'affect vient renforcer les complexes déjà constitués. Il estime également qu'il y a trois formes d'inconscients : le personnel, l'impersonnel et le collectif et met en exergue, le processus d'individualisation qui consiste à traiter un affect, une compulsion, une inhibition ou une pensée obsédante en la faisant jouer, rejouer à la manière d'une création.
Désigné par Freud comme prince héritier et successeur "in partibus infédélium", Carl-Gustav Jung organisera le premier congrès de la psychologie Freudienne et deviendra président de l'Association internationale de psychanalyse et rédacteur en chef du "Jahrbuch für psychoanalytische und psychopatogische forschungen", l'organe officiel du mouvement. La tension avec Sigmund Freud se fait plus palpable après le voyage commun aux Etats-Unis où les deux hommes comprennent qu'ils n'ont pas la même vision de transmission de la psychanalyse. La rupture sera définitive en 1913.
Jung choisit alors pour son courant le terme de psychologie analytique et laisse le terme psychanalyse aux Freudiens et developpe ses concepts de l'Ombre, de l'Anima et celui de l'Animus.
Dès 1920, il entreprend plusieurs voyages en Afrique du Nord et Tropicale, au Nouveau-Mexique et dégage l'idée que le rêve de féconder la mère est une manière de s'engendrer identique à soi-même et anticipe par là, la réflexion ultérieure de Freud sur le narcissisme.
Vers la fin de sa vie, Jung s'intéressera de plus près à l'alchimie, "science" qu'il avait déjà abordé plus tôt dans sa vie et écrira en 1944, psychologie et Alchémie. Il s'intéressera également à la religion et publie en 1952, réponse à Job. Il décèdera en 1961, d'une attaque cérébrale.
Dans ce petit livre de la collection des Presses Universitaires de France, Christian Gaillard nous brosse donc le portrait de Carl Gustav Jung en laissant une large part à l'enfance, ce qui permet au lecteur de découvrir et de comprendre les mécanismes qui ont amené Jung à s'interesser au plus près à ce qui deviendra la psychologie analytique et la psychanalyse. Ce livre est à l'adresse de tous mais une certaine connaissance des termes utilisés dans ces deux disciplines peuvent amener à une meilleure compréhension de l'ouvrage qui, s'il ne se veut pas plus didactique que cela n'en sera pas moins difficile parfois d'accès aux profanes.
Certaines tournures de phrases pourront également déranger et obliger le lecteur à les relire deux, trois fois pour se les approprier totalement.
Un livre donc qui s'adresse à ceux qui souhaitent découvrir un peu plus Carl-Gustav Jung mais qui devront au préalable ne pas hésiter à faire quelques recherches en parallèle sur les termes usités pour mieux appréhender leur lecture sans que celle-ci ne soit perçue comme redondante.
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Extrait :
Jung ne sut tout d'abord trop quoi faire de ses observations. Il les laissa en attente pendant deux ans, poursuivant ses études de médecine, puis de psychiatrie. Mais en 1901, après donc son engagement au Burghölzli et à l'incitation de Bleuler, il en fit l'objet de sa thèse de doctorat, intitulée "Sur les phénomènes dits occultes" et publiée en traduction française dans "L'énergétique psychique". Dans cette thèse, il rapproche le cas de cette médium d'autres largement décrits dans la littérature spécialisée ou observés à l'hôpital et il pose le diagnostic de délire hystérique, en montrant dans son somnambulisme les effets moteurs de ce qu'il appelle déjà avec insistance l'inconscient.
Son analyse porte surtout sur les "romans" généalogiques idéalisants que se construisait la jeune femme dont il souligne aux passage l'hérédité immédiate chargée. Et en transcrivant très exactement sous sa dictée l'organisation très élaborée et graphiquement concentrique de ses systèmes délirants, il montre en quoi et comment ils étaient une tentative pour constituer ou reconstituer l'unité de sa personnalité dissociée.
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