22 Janvier 2020
En 2017, une simple enquête pour la chaîne de télévision NBC mène Ronan Farrow à une histoire dont on n’ose parler qu’à voix basse : un des producteurs les plus puissants de Hollywood serait un prédateur sexuel, protégé car il règne par la terreur et l’argent. Ainsi démarre l’affaire Harvey Weinstein.
Auteur : Ronan Farrow
Nombre de pages : 446
Eidtion : Calmann-Lévy
Collection : Documents, Actualités, Société
Date de parution : 16 octobre 2019
Prix : 21.90€ (Broché) - 15.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2702167359
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Fondateur de la Miramax et de la Weinstein Company, Harvey Weinstein fut le roi de Hollywood dans les années 90 et ce, jusqu'en 2017, début de la chute. Ses films, des œuvres indépendantes au début, remportèrent près de 300 nominations aux oscars, le propulsant aux firmaments des étoiles telles celles que l'on trouve sur le Walk of Fame. On lui doit entre autres "The Artist", les films de Quentin Tarantino, "Will Hunting", "Le seigneur des anneaux", "le patient anglais", "le discours d'un roi", etc.
Pour cela, Harvey Weinstein a régné sans partage avec son frère sur Hollywood. Personne ne pouvait lui résister, pas plus les acteurs, que les scénaristes, les actrices, les patrons de chaine de télé, les présentateurs, les journalistes, et même les politiques.
Celui qui à 18 ans, fonda avec son ami Corky Burger, une rubrique pour le journal de leur fac, intitulée "Denny the Hustler" ou Denny l'arnaqueur (qui passait son temps à menacer les femmes pour qu'elles se soumettent) est passé de l'écriture à la réalité.
Son arme ? Le contrôle.
Connu pour son approche brutale, voire menaçante de gérer ses affaires, il le fut tout autant pour menacer les femmes (près de 80 porteront plainte) qu'il voulait mettre dans son lit ou desquelles il attendait des faveurs sexuelles.
Pour cela, Harvey Weinstein donnait tour à tour rendez-vous dans un restaurant, puis dans une chambre d'hôtel, sous un prétexte bidon avant de demander que sa victime le regarde prendre une douche et lui fasse ensuite une petite gâterie. Il se rendait aux toilettes, puis revenait quelques minutes plus tard en robe de chambre pour sauter sur sa proie "J'ai dit non plus d'une fois, et il s'est couché sur moi. Il pesait de tout son poids sur moi", racontera Alexandra Canosa, une productrice.
En juin 2016, le journaliste Ronan Farrow, fils adoptif de Mia Farrow et de Woody Allen (et qui a pris la défense de sa soeur dans le procès pour attouchements contre Allen), obtint le feu vert de la chaine NBC pour une série de documentaires intitulés "The dark side of Hollywood" (le côté sombre de Hollywood). S'intéressant au sujet de la promotion canapé dans le milieu du cinéma, on lui conseilla d'aller interviewer l'actrice Rose MacGowan qui avait twetté à propos de Weinstein. En commençant son enquête, Farrow se rend compte que le nom d'Harvey Weinstein revient pratiquement tout le temps dans les conversations, mais que personne ne peut rien dire parce tous ont trop peur.
Il faut dire que Weinstein est même parvenu, dans une certaine mesure, a infiltrer la division spéciale pour les victimes du NYPD alors qu'une dizaine de plaintes pour attouchements ont été portées à leur connaissance contre lui.
L'homme semble intouchable.
D'interview en interview, Ronan Farrow comprend qu'il tient là de quoi faire chuter le roi de Hollywood, mais c'est sans compter sur la peur des dirigeants de sa chaine qui jouent avec lui un double-jeu, informant Weinstein des progrès du jeune journaliste qui se retrouve mis sur la touche et menacé. Tout comme seront menacées celles qui tentent de témoigner et de passer outre l'accord qu'elles ont signé avec leur violeur.
Licencié, Ronan Farrow relance son enquête via le journal "The New Yorker" et parvient à faire éclater, conjointement avec le New York Times, le scandale Weinstein, dont le procès vient de débuter.
"Les Faire Taire" retrace presque jour pour jour les avancées, et les reculades de son enquête, marquant les renoncements, les bâtons dans les roues qui lui sont mis (comme par exemple le fait qu'il ait été suivi par des agences de renseignement privées israéliennes à la solde de Weistein). Son livre met en lumière l'omerta qui s'est abattue non seulement sur Hollywood mais aussi au coeur du système médiatique où le droit de cuissage était légion et paraissait naturel. Certains préférant fermer les yeux délibérement. Ne parlons pas de la victime qui osait se rebeller, les menaces sur sa carrière pleuvaient alors et un accord bien ficelé permettait de tuer la plainte dans l'oeuf.
Ce livre, ce n'est donc pas seulement une enquête sur l'affaire Weinstein, prémice de #MeToo, mais aussi et surtout la découverte d'une institution
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Les faire taire, de Ronan Farrow
Depuis la création des premiers studios de cinéma, on a connu peu de producteurs aussi dominants, ou dominateurs, que celui auquel faisait référence Rose McGowan. Harvey Weinstein cofonda les compagnies de production et de distribution Miramax et la Weinstein Company, participant à réinventer le modèle des films indépendants notamment grâce à Sexe, mensonges et vidéo, Pulp fiction et Shakespeare in Love. Ses productions obtinrent plus de trois cents nominations aux oscars et, lors des cérémonies annuelles de remise des prix, il reçut plus de remerciements que quiconque dans l’histoire du cinéma, juste après Steven Spielberg, et devançant largement Dieu. Parfois, cette comparaison semblait même appropriée : Meryl Streep l’appela Dieu en plaisantant.
Weinstein mesure un mètre quatre-vingt-deux et il est corpulent. Son visage est asymétrique et il plisse en permanence un œil. Il porte souvent des tee-shirts extra-larges et des jeans amples qui lui font une silhouette ballonnée. Fils d’un diamantaire, Weinstein grandit dans le Queens. À l’adolescence, son frère cadet, Bob, et lui firent le mur pour aller voir Les Quatre Cents Coups dans un cinéma d’art et d’essai, espérant qu’il s’agissait d’un « film de sexe». Mais ils se retrouvèrent devant un Truffaut et tombèrent amoureux des films d’auteur. Weinstein s’inscrivit à la State University of New York à Buffalo en partie parce que la ville comportait de nombreux cinémas. À l’âge de dix-huit ans, un de ses amis, Corky Burger, et lui rédigèrent une rubrique pour le journal de leur fac, le Spectrum, mettant en scène un personnage dénommé « Denny the Hustler » (Denny l’arnaqueur) qui menace les femmes pour qu’elles se soumettent. « Denny l’arnaqueur n’acceptait pas le refus », pouvait-on y lire. « Son approche repose sur une psychologie du contrôle, ou en terme profane : “Écoute bébé, je suis sans doute l’homme le plus séduisant et le plus excitant que tu rencontreras jamais, et si tu refuses de danser avec moi, je vais sans doute te casser cette bouteille de bière sur le crâne.” »
Weinstein abandonna ensuite ses études pour monter avec son frère et Burger une entreprise d’abord appelée Harvey and Corky Productions, spécialisée dans la promotion de concerts. Mais dans le cinéma de Buffalo dont il fit l’acquisition, Weinstein proposait aussi les films indépendants et étrangers dont il s’était entiché. Finalement, Bob et lui créèrent Miramax, inspiré par les prénoms de leurs parents, Miriam et Max, et commencèrent à acheter de petits films étrangers. Weinstein s’avéra avoir le flair pour transformer des films en événements. Ils obtinrent des récompenses, dont la Palme d’or inattendue pour Sexe, mensonges et vidéo. Au début des années 90, Disney racheta Miramax. Weinstein passa une décennie telle une poule pondant œuf d’or après œuf d’or. Et dans les années 2000, quand la relation avec Disney vacilla et que les frères montèrent une nouvelle entreprise, la Weinstein Company, ils levèrent des centaines de millions de dollars de fonds. Weinstein ne retrouva pas ses jours de gloire, mais remporta consécutivement l’oscar du meilleur film pour Le Discours d’un roi en 2010 et The Artist en 2011. Durant son ascension, il épousa son assistante, divorça, puis épousa plus tard une actrice en devenir à qui il avait commencé à donner de petits rôles.
Weinstein est connu pour sa manière brutale, voire menaçante, de gérer ses affaires. Il peut aller jusqu’à effrayer, à l’image du poisson-globe quand il se gonfle. Il approche ses rivaux ou ses subalternes en face à face, le visage cramoisi. Donna Gigliotti, qui partage avec lui un oscar pour la production de Shakespeare in Love, déclarera à un journaliste : « Un jour, j’étais à mon bureau et j’ai eu l’impression que nous avions été frappés par un tremblement de terre. Le mur a tremblé. Je me suis levée. On m’a dit qu’il avait lancé un cendrier en marbre contre le mur. » Et puis il y a des récits, des rumeurs surtout, faisant état d’une forme de violence plus sombre à l’encontre des femmes, et des efforts pour faire taire ses victimes. De temps à autre, des journalistes, alertés par les rumeurs, vont fouiner, pour voir si celles-ci sont fondées.
Les mois précédant l’élection présidentielle de 2016 ne modifièrent pas beaucoup le quotidien de Weinstein. On le vit au cocktail organisé pour William J. Bratton, ancien préfet de police de New York. On le vit en train de rire avec Jay-Z, annonçant la signature d’un contrat de cinéma et de télévision avec le rappeur. Et on le vit, renforçant des liens de longue date avec les personnalités politiques du parti démocrate pour lequel il était depuis longtemps un collecteur de fonds majeur. Toute l’année, il fit partie du groupe de réflexion d’Hillary Clinton. Dans un e-mail à l’équipe de Clinton, au sujet des messages envoyés par l’équipe de Bernie Sanders aux électeurs latinos et afro-américains, il écrivit : « Je vous apprends sans doute des choses que vous savez déjà, mais il faut passer ça sous silence. »
Dans un e-mail qui contenait un article critiquant Sanders et qui insistait pour mener une campagne contre lui, on peut lire : « Cet article vous donne tout ce dont j’ai parlé avec vous hier. » Le directeur de campagne répondit : « Vais envoyer des trucs créatifs. Suivi tout de suite votre idée. »
À la fin de l’année, Weinstein avait levé des centaines de milliers de dollars pour Clinton. Quelques jours avant le tweet de McGowan, Weinstein se trouvait au St James Theater à New York pour une généreuse collecte de fonds qui mettrait deux millions supplémentaires dans les coffres de la campagne de la candidate démocrate. La musicienne Sara Bareilles, baignée de lumière mauve, chanta :
Your history of silence won’t do you any good
Did you think it would ?
Let your words be anything but empty
Why don’t you tell them the truth ?
Ce texte semble trop approprié pour être vrai. Mais la scène eut vraiment lieu.
Au cours des années précédentes, l’influence de Weinstein avait un peu diminué, mais elle était encore suffisante pour recueillir l’adhésion publique des élites. Quand arriva la fin de la saison des oscars cet automne-là, un critique de cinéma du Hollywood Reporter, Stephen Galloway, publia un article intitulé : « Harvey Weinstein, le retour », avec pour sous-titre : « Les raisons de le soutenir sont nombreuses, surtout maintenant. »
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