Au détour d'un livre

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Le manoir des sacrifiées, d'Olivier Merle

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Résumé :  Un crâne de Neandertal posé sur un meuble. Un homme prosterné devant lui, comme s’il priait. Son front est fracturé, un de ses yeux, arraché. Son épouse est introuvable ; les traces de lutte montrent qu’elle a sans doute été enlevée.
Jamais le commandant Grimm et son équipe n’auraient imaginé être confrontés à une mise en scène aussi macabre. D’autant que la scène se reproduit…

Auteur : Olivier Merle
Nombre de pages : 410
Éditeur : XO Editions
Date de parution :
20 octobre 2022
Prix : 21.90€ (Broché) - 13.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2374484280

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Avis / Critique :

Baptiste Gormonnac, petit cadre dans une société d'import-export, est tué dans d'affreuses circonstances. Son assassin l'a fait poser en position de prière, lui a enlevé un œil et a posé un crâne de Néandertal sur le buffet. Son épouse Solène, elle a disparu.
Quelques jours plus tard, un certain McGronon est à son tour assassiné, toujours dans les mêmes circonstances et sa femme est elle aussi enlevée.
Le commandant Grimm venu tout droit de Grenoble est en poste à Rennes. Il est mis sur ces deux étranges affaires par son supérieur d'allure débonnaire. Avec son équipe composée du lieutenant Jarry, de la pétillante Ermeline et du désabusé Blanchard, Grimm enquête. Qui donc est ce tueur qui leur expédie par la presse l’œil manquant de la victime depuis une adresse semblant se situer dans le Finistère qu'il signe André Tanle, Manoir de Lan-ar-denet.
Mais tout va se bousculer quand Grimm va se retrouver personnellement impliqué quand son ex-maitresse et mère de son enfant, Amandine, va se faire enlever à son tour par le même individu, il en est certain. Pour preuve, le modus operandi qui est le même.
Mais voilà, à Grenoble, son ancien adjoint va lui mettre des bâtons dans les roues et tout faire pour que l'enquête lui soit retirée. D'ailleurs, Grimm n'a-t-il pas autrefois frappé le mari de son ex-maitresse ? Serait-il donc l'assassin qui aurait tenté de masquer son crime en épousant le modus operandi du tueur du Finistère ?
Grimm, contraint d'être mis sur la touche s'en remet à son lieutenant, Jarry pour s'occuper de l'enquête. Lui, tirera les ficelles de loin pour amener les uns et les autres à découvrir qui est l'auteur de ces horribles meurtres, d'autant qu'il lui faut retrouver Amandine et les autres femmes enlevées avant qu'il ne soit trop tard. Pour cela, Grimm va mettre la main sur un étrange cercle qui vénère Néandertal en forêt de Brocéliande. S'intégrant au groupe, il en profite pour cuisiner les protagonistes depuis l'intérieur.
Cela sera-t-il bénéfique ou fait-il fausse route ?
Qui est cet homme étrange qui apparait au rituel de Brocéliande, mais disparait aussitôt, évitant de se faire voir des autres ? Quel est le rapport entre tous ces meurtres et que cherche l'assassin en enlevant les épouses des victimes ?

Bon, disons tout de suite qu'il ne s'agit pas ici d'un grand thriller. On est en effet bien loin d'un Thilliez ou d'un Denjean et pas une seconde, on ne tremble en lisant les lignes de ce livre. Il s'agit plutôt d'un roman policier avec une enquête qui se mène tranquillement ponctuée d'humour, mais loin d'être renversante. C'est la seconde enquête du commandant Hubert Grimm et on sent qu'Olivier Merle a pris plaisir à raconter ses aventures. L'intrigue en elle-même se tient, mais fait plus penser à un livre de la collection Le Masque des années 60. Pour en faire un excellent thriller, il lui manque de la tension, du suspens et de l'ambiance. Malheureusement, rien de tout cela ici.
Reste une bonne histoire avec un fond d'humour et un postulat un peu tiré par les cheveux (l'histoire de Néandertal) qui aurait gagné à être plus approfondi et amené. On a finalement du mal à y croire et à entrer pleinement dedans. C'est dommage. Malgré tout, une fois lancé, Le Manoir des sacrifiées se lit tranquillement, et on se laisse emmener vers la résolution de l'énigme sans trop se laisser prier.

Dans la moyenne, sans plus ni moins.

 

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Le manoir des sacrifiées, d'Olivier Merle - www.audetourdunlivre.com

Extrait :

 

3

Ermeline sur ses talons, Grimm arpentait les couloirs de la PJ, pressé de retrouver Jarry et Blanchard pour les informer des étranges détails de l’affaire. Ses deux adjoints travaillaient tranquillement, chacun derrière son ordinateur.

Selon son habitude, Grimm tapa dans ses mains pour signaler qu’il improvisait une réunion.

— On a un crime intéressant sur les bras.

Ermeline s’assit à son bureau tandis que Jarry et Blanchard levaient vers leur patron des yeux interrogateurs. En quelques mots, il résuma les circonstances du drame. Il conclut en lançant les opérations :

— On a du pain sur la planche et il ne faut pas traîner. Des questions ?

Il n’y en eut pas, chacun attendant de connaître le rôle qui lui serait dévolu.

— Ermeline, tu te charges de l’enquête de voisinage et de retrouver le livreur qui a découvert le cadavre. Corentin et Éric, vous passez tout au peigne fin dans la maison. De mon côté, je contacte la famille de Solène pour savoir où elle est et je lance un avis de recherche en cas d’insuccès. Et, bien sûr, j’essaye d’en apprendre davantage sur son mari.

Pointant ensuite le menton dans leur direction, il ajouta sur un ton martial :

— Exécution !

Manière de tourner en dérision son rôle de chef, Grimm étant tout sauf autoritaire.

Ce soir-là, quand Grimm rentra dans son appartement, il fut encore une fois frappé par la désolation qui y régnait. L’évier était encombré de vaisselle sale, la table de la cuisine n’avait pas été 

essuyée, le lit était défait, l’oreiller par terre, jusqu’au tube de dentifrice qui, sur la tablette de la salle de bains, n’avait pas été rebouché, et la serviette qui traînait sur le carrelage.

En fait, depuis la naissance de son fils, l’éloignement géographique d’Amandine était dur à supporter. Car, désormais, il existait un lien entre eux. Un lien difficile à nier ou à rompre. Indéfectible. À moins de faire une croix définitive et irrémédiable sur le passé – ce dont Grimm n’était pas capable –, un enfant témoignait de leur ancienne relation amoureuse.

Et puis, qui peut dire quand un amour est vraiment terminé ? Lorsque Amandine était venue le voir à Rennes quelques mois plus tôt, n’avait-il pas éprouvé pour elle la même tendresse qu’auparavant ? Il avait refusé de l’avouer, surtout à elle, mais au fond il n’était pas dupe.

C’était pourtant lui qui l’avait quittée ! Déjà insupportable quand il fallait se cacher du mari, la situation avait dégénéré lorsque celui-ci avait découvert que sa femme le trompait. Jusqu’à cette imbécile bagarre de chiffonniers où, bousculé et injurié par le jaloux, Grimm avait fini par lui mettre son poing dans la figure. À la PJ, en plus, devant ses collègues qui avaient assisté à la scène bouche bée.

Muté à sa demande. Loin. Du soleil écrasant de Montpellier au vivifiant crachin breton. Voilà quel avait été le résultat de cet amour agité ! Enfin… Pas le seul résultat ! Un enfant, c’était bien plus réel que toutes ces chamailleries d’adultes.

Grimm ouvrit le réfrigérateur et décapsula une bière. Il s’installa sur le canapé en allumant une cigarette.

Il n’avait jamais désiré vivre en couple. Trop solitaire sans doute pour se plier aux exigences et aux contraintes d’un ménage. Rien que ce mot lui faisait horreur, évoquant la serpillière et le balai.

Du reste, il n’en avait pas été question. Amandine ne voulait pas quitter son mari et ses deux enfants, affirmant aimer deux hommes en même temps, ce que Grimm n’avait jamais cru. Peut-être se trompait-il, car elle avait toujours paru sincère à ce sujet. En tout cas, elle en était convaincue ; ce n’était pas de la duplicité de sa part.

Évoquer les autres enfants d’Amandine engendrait un surplus de tristesse. Son fils avait un frère et une sœur. Là-bas était sa vraie famille, constituée, homogène, dont il n’aurait en grandissant aucune raison de douter.

Plus tard, dans son lit, Grimm saisit son portable et regarda des photos. Amandine, au parc d’enfants, assise sur un banc, d’une attirante beauté, ses longs cheveux châtains encadrant un visage régulier, dont les diverses expressions reflétaient cependant, malgré la douceur des traits, une volonté farouche et indestructible. Louis, qui ne tarderait pas à marcher. On le voyait se tenir debout, s’accrochant au banc, vacillant sur des jambes arquées encore potelées. La photo suivante le montrait assis sur son derrière, regardant le banc, interloqué de s’être effondré en arrière. Il n’était pas tombé de 

bien haut, en une chute molle et contrôlée, amortie à l’arrivée par sa couche. Sur la troisième, Grimm était accroupi et Louis, de nouveau debout, s’accrochait à ses genoux.

Maigres souvenirs d’une des rencontres clandestines organisées par Amandine, dans un parc, trois semaines auparavant. Une éternité. C’était tout ce à quoi il avait droit.

Dès le lendemain matin, Ermeline mena l’enquête de voisinage. Un seul fait notable émergea des informations glanées chez les habitants de la rue. Rien n’indiquait que Solène fut absente ces derniers temps et deux témoins affirmèrent l’avoir aperçue le jour du meurtre, garant sa voiture au retour de son travail.

Dernière étape de ses investigations, Ermeline sonna à la maison située à droite de celle des Gormonnac. Elle patienta une pleine minute avant d’entendre une voix revêche de femme, en apparence assez âgée :

— C’est pour quoi ?

— Lieutenant Gasquet de la police judiciaire. Je souhaiterais vous poser quelques questions sur le drame qui s’est produit hier chez vos voisins.

Un silence. Un temps d’attente, puis des bruits de verrou qu’on ouvre. Ermeline en compta trois disposés de haut en bas sur la porte. Le battant s’écarta de vingt centimètres. Un visage ridé, une bouche édentée et deux yeux soupçonneux apparurent dans l’encadrement.

— Y a des femmes dans la police, maintenant ?

— Oui, madame, la preuve.

— C’est pas un métier de femme, ça ! Enfin, de nos jours, tout est à l’envers de toute façon…

— Puis-je entrer, madame, je n’en aurai pas pour longtemps.

La vieille laissa passer Ermeline, mais en maintenant la porte à peine entrouverte, comme si l’ouvrir en grand comportait un danger. Elle referma aussitôt derrière elle.

Il n’y avait dans la cuisine qu’une seule chaise, sur laquelle la vieille s’assit en lâchant :

— À mon âge, on peut pas rester debout trop longtemps.

Ermeline tira un carnet de sa poche.

— Vous êtes au courant de ce qui s’est passé à côté ?

— Toute cette police dehors depuis hier ? J’pense bien ! J’suis sortie voir, mais ils m’ont rembarrée sans ménagement ! Mais j’lis Ouest France et Le Télégramme, comme tout le monde !

— J’aurais voulu savoir si vous aviez remarqué quelque chose d’anormal le soir du meurtre.

 

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