16 Juillet 2023
Résumé : Quand, à l'été 2002, les policiers d'Eastlake, dans la banlieue de Cleveland, découvrent le cadavre d'un retraité dans sa salle de bain, l'affaire est entendue : Joseph Chandler s'est suicidé. Ses voisins et ex-collègues décrivent un ermite sans famille, mutique, aux habitudes étranges. Ni son appartement ni son pick-up ne portent la moindre empreinte. Qui prend soin d'effacer toutes ses traces au quotidien ?
Auteur : Thibaut Raisse
Nombre de pages : 208
Édition : 10/18
Date de parution : 1 juin 2023
Prix : 7.50€ (poche) - 7.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2264079800
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Journaliste depuis 2007, Thibault Raisse, qui a co-écrit l'article sur Xavier Dupont de Ligonnès en 2020 dans le magazine Society, s'intéresse ici à un autre fait divers au travers d'un court roman. L'histoire se passe aux États-Unis et part d'un mystère, celle de la mort d'un homme retrouvé dans son appartement. Joseph Chandler, homme taciturne, peu sociable, vivant seul se serait suicidé. Oui, mais voilà, le suicide ne colle pas avec les faits. Très vite, la police cherche à mieux comprendre cet homme que personne ne connaissait vraiment, au point que ne parviennent aux enquêteurs que quelques bribes de sa vie. L'homme, habitait un studio dans lequel il n'avait pratiquement rien, à part quelques vêtements. On dirait presque une chambre d'hôtel. La police retrouve dans le bureau, un sac avec à l'intérieur une quinzaine de balles, mais l'étui à revolver est vide. Où se trouve-t-il ? Pas dans l'appartement.
Joseph Chandler, 64 ans, vivait là depuis 17 ans et n'avait pas d'enfants. Pas d'héritiers connus, donc. Avant que l'état n'empoche ce qu'il y a sur le compte en banque de Joseph, une chasse à l'héritier est lancé par le tribunal... Une chasse qui va tout faire basculer, car les détectives engagés par le tribunal découvrent que Joseph Chandler n'existe pas. Ou du moins, n'existe plus. Le porteur du nom, le vrai, serait décédé, enfant.
Alors qui est l'homme qui est mort dans l'appartement dans la banlieue nord de Cleveland ? Quel était son véritable nom et pourquoi a-t-il changé d'identité ? Que fuyait-il ? Etait-ce un témoin protégé ? Un meurtrier ? Fuyait-il quelqu'un ?
L'affaire Joseph Chandler ou "L'inconnu de Cleveland" a fait la une des journaux en 2018, quand l'affaire a été relancé après une recherche en ADN qui a permis de trouver sa véritable identité. Un appel à témoin a été lancé, un forum d'enquêteurs amateurs s'est intéressé à l'affaire.
Thibault Raisse nous raconte ce mystère, cette quête, les différentes enquêtes, tout le déroulé depuis la découverte en 2007 du corps du présumé Joseph Chandler. Il revient sur les différentes hypothèses qui ont vu le jour, les suppositions concernant ses méfaits. Tout ce côté de l'investigation est diablement intéressant, car on se demande en tant que lecteur qui était cet homme. On attend la fin avec impatience avec la révélation finale, celle qui va clôturer les 200 pages de lecture. Et puis, voilà qu'à la fin alors que l'on a fait le tour des suppositions, le livre se referme. Il n'y a pas de révélation finale. Le lecteur reste sur sa faim, sur ses interrogations. Mais qui était donc ce Joseph Chandler, dont on apprend la véritable identité, mais dont on ne connaitra pas le motif de la fuite, du changement de nom.
C'est la douche froide après avoir pris un bain chaud. C'est la descente après avoir connu l'acmé.
Thibault Raisse nous laisse là, sur le bord de la route et ne revient pas nous chercher pour nous dire "Bon, allez, c'était une feinte, voilà la résolution de l’énigme..." Eh bien, non, rien, Nada.
Vous l'aurez compris, j'ai aimé toute l'investigation, la manière de raconter l'histoire connue de cet homme, ce ce fait divers qui a tenu en haleine les États-Unis. La déception en a donc été d'autant plus grande en refermant ce "L'inconnu de Cleveland" qui va d'un certain point le rester.
C'est bien amené, c'est intéressant, c'est bien écrit, mais cela retombe comme un soufflet qui gâche tout.
On se dit finalement que l'on n'est pas sûr de donner encore 7.50€ pour une autre enquête de cet acabit si tous les livres de la collection sont dans le même genre. A voir donc. Les frustrés s'abstenir. Les autres qui ont envie de se détendre sur la plage, allez-y, cette histoire vous interrogera et vous plaira.
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L'inconnu de Cleveland, de Thibault Raisse - www.audetourdunlivre.com
Larry Morrow n'aurait pas dû fourrer son nez dans le dossier Chandler. Simple détective privé, il est d'office hors course dans la quête judiciaire aux héritiers. Seuls les avocats dûment agréés par le tribunal peuvent être nommés par le juge des successions pour épauler l'administrateur public - ici l'ex-collègue Mike Onderisin - dans ses recherches. Sans être techniquement hors la loi, le juge Ted Klammer fait donc preuve d'une certaine souplesse avec son propre règlement lorsqu'il rencarde Larry par téléphone à l'automne 2002 : "On vient de rentrer un dossier sur lequel tu devrais te pencher ", glisse-t-il l'air de ne pas y toucher.
Le magistrat a deux bonnes raisons de tuyauter le "privé" : ils sont amis d'enfance, et Larry Morrow, cinquante-huit ans, passe pour l'un des chasseurs d'héritiers les plus expérimentés et respectés des États-Unis. Moustache épaisse et regard concupiscent à la Burt Reynolds, il a, sinon inventé le métier, du moins perfectionné le business comme personne avant lui. Le principe est enfantin. Le titulaire d'un compte bancaire meurt sans famille connue, Morrow retrouve la trace d'un héritier et lui donne accès au magot amputé de sa commission de trente pour cent. En dehors du jeu de piste lui-même, la difficulté de l'exercice consiste à verrouiller juridiquement le deal dans un pays où l'argent est plus sacré que les morts. Issu d'une famille d'ouvriers à la chaine et déscolarisé avant le bac, Larry a mis deux ans à peaufiner le contrat parfait et à empocher ses premiers dollars.
Depuis plus de trente ans, la journée de Larry commence tôt le matin par la réception du journal des annonces légales. Il prend connaissance des dossiers de patrimoines orphelins fraichement ouverts au tribunal de Painesville, puis s'y rend pour creuser les mieux dotés. Ses enquêtes l'on mené dans les cinquante Etats, en Allemagne, en Angleterre, en France. Il est capable d'arpenter des heures durant les allées de cimetières déserts à la recherche d'une date de décès ou d'un nom de jeune fille pour compléter une généalogie à trous. Ses plus belles commissions dépassent les cent mille dollars. Au sommet de sa gloire dans les années 1980, il salariait quatre employés dans ses bureaux sur deux niveaux et se déplaçait en jet privé. Puis la concurrence s'est faite de plus en plus rude. Larry Morrow n'a pourtant rien perdu de son savoir-faire, ni du plaisir sans cesse renouvelé du mystère à élucider.
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