Au détour d'un livre

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Retour sur l'île, de Viveca Sten

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Résumé : C'est l'hiver sur l'île de Sandhamn. La tempête de neige qui fait rage contraint les habitants à rester chez eux. Un matin, on découvre le cadavre d'une femme sur la plage : la célèbre correspondante de guerre Jeanette Thiels était connue pour son franc-parler avec certaines personnalités influentes, issues notamment du parti xénophobe Suède Nouvelle. Crime politique ou vengeance personnelle masquée ? L'inspecteur Thomas Andreasson n'a pas le temps de répondre qu'un nouveau meurtre a lieu.

Auteure : Viveca Sten
Nombre de pages :
576
Édition : Le livre de poche
Date de parution : 2 mai 2019
Prix : 22€ (Broché) - 8.70€ (Poche) - 3.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2253259947

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 Avis / Critique :

Jeanette Thiels, divorcée, un enfant, est retrouvée morte dans le froid sur l'île de Sandhamn, le lendemain de Noël. Que faisait-elle là, seule et où est passé son ordinateur ? Qui a retourné sa chambre et qui l'a empoisonné ? Thomas Andreasson, qui se trouve à proximité, est envoyé sur les lieux et va mener l'enquête avec ses acolytes habituels, Aram et Margrit.
Sixième tome des livres qui ont donné naissance à la série "Meurtres à Sandhamn" qui compte à ce jour 10 saisons (pour ceux que cela intéresse), on peut dire d'emblée que ce "Retour sur l'île" est une déception.
Je m'explique.
Donc, le livre commence par le décès de Jeanette Thiels, reporter qui a coutume de se rendre dans divers pays pour couvrir des sujets aussi variés que la guerre ou l'immigration et donc est amenée à s'intéresser à différents courants politiques et à s'attirer par là même des inimitiés plus ou moins fortes. Une enquête dès lors est menée sur son décès le jour de Noël.

Et là, c'est la cata. Si le début semblait quelque peu prometteur, Viveca Sten fait trainer l'investigation de ses protagonistes en longueur. Il ne se passe rien, ou pas grand-chose tout au long du roman. A chaque fois, ses enquêteurs semblent faire chou blanc ou suivre une piste qui ne mène à rien d'important. Pourtant, l'auteur nous abreuve de chapitres courts, ce qui tendrait à donner de la dynamique à l'ensemble et à permettre, justement, de laisser libre cours à diverses théories. Il n'en est rien.

On suit en parallèle, Nora Linde, l'amie de Thomas (déjà présente dans les autres tomes) au sein de son entreprise, travaillant sur une affaire assez tendancieuse sur fond de rachat et de paradis fiscaux. On se dit que cela va nous mener quelque part, qu'il y a un lien, et bien non. La séquence de Nora n'est là que pour meubler et lui donner un rôle dans ce roman. Tout au plus, son rabibochage avec son ex-mari Henrik parait intéressant. Il y a ensuite la blonde de l'extrême-droite qui est affublée des poncifs habituels, un bras droit issu des suprémacistes américains, un mari faiblard. Il y a bien sûr, le flic, Aram, dont la famille a fui la guerre au Moyen-Orient et qui semble là pour devenir la caution immigré qui ne va pas avoir de bol.
Et puis, il y a résolution de l’énigme qui arrive quand même dans les dernières pages un peu à la va-vite, bâclée, pas transcendante, finalement facile. On sent que Viveca Sten n'était pas très inspirée, mais que son histoire sert surtout à son envie de montrer ses opinions politiques. Soit, pourquoi pas, mais c'est dommage, car elle n'en a pas tiré profit pour traiter en profondeur son intrigue. 

Finalement, hormis les histoires des uns et des autres dans leur couple respectif qui racontent leur quotidien et leurs difficultés, et qui amène un peu de couleur à l'ensemble, l'enquête en elle-même est morne, peu intéressante, lente. Il ne se passe rien, cela traine en longueur de chapitre en chapitre. Il n'y a pas de twist. Pourtant, je le pense, il y avait de quoi faire un chouette roman. L'environnement est bien décrit, on s'imagine très bien être sur l'île et dans les autres lieux, le roman se lit bien, grâce aux chapitres courts. Mais c'est plat, plat, plat avec un dénouement tiré par les cheveux.

Ce "Retour sur l'île" se lit, mais s'oublie tout aussi vite. Seul, reste la manière de tuer Jeanette, originale par son approche.

Pour conclure, vous l'aurez compris, ce n'est pas le meilleur de la série des "Sandhamn". A lire donc pour les aficionados qui ne voudraient pas louper les intrigues personnelles développées dans les autres romans. Pour les autres, vous pouvez passer votre chemin et prendre un autre livre de la série.

 

 

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Retour sur l'île, de Viveca Sten - meurtres à sandhamn - www.audetourdunlivre.com

Extrait :

 

1.
Mercredi 24 décembre 2008

Pourvu qu’elle arrive à Sandhamn, tout irait bien. Nulle part elle ne se sentait plus en sécurité.

Jeanette se le répétait comme un mantra tandis qu’elle roulait dans la neige fondue sur l’autoroute. Plusieurs fois, elle dut chasser ses larmes en clignant des yeux pour voir la route. Sur le pont de Skurubron, elle faillit déraper.

Elle dépassa le golf au niveau du pont de Fågelbro sur le canal Strömma. Le ferry partait dans quelques minutes, à trois heures moins le quart. Il fallait qu’elle arrive à temps, c’était le dernier de la journée.

Au bout d’une éternité, le port de Stavsnäs s’ouvrit devant elle. Elle s’engagea sur le parking à moitié plein. Elle dut s’y reprendre à plusieurs fois, mais finit par réussir à fermer la porte de sa Ford.

Le vent lui mordit les joues, la température avait fortement chuté, il devait bien faire moins dix, voire plus froid. Un peu plus loin claquaient les filins d’un mât sans drapeau et, dans la baie, des crêtes d’écume couronnaient les vagues.

Une légère aigreur lui montait dans la gorge, mais elle n’avait pas le temps de s’en inquiéter.

Tête baissée, elle se précipita vers le quai où le gros bateau attendait dans la pénombre grise. Elle était la dernière à embarquer : on remonta la passerelle après elle et, quelques secondes plus tard seulement, le ferry appareilla. Elle ne put s’empêcher de se retourner pour voir s’il y avait quelqu’un derrière elle.

Jeanette se blottit dans un coin à l’arrière du ferry, et rabattit sa capuche, cachant presque totalement son visage. Elle aurait dû manger quelque chose, mais était trop fatiguée pour monter à la cafétéria, au pont supérieur : elle s’abandonna à une sorte de somnolence dans le grondement du moteur. Ce son régulier l’apaisait.

Son portable vibra dans sa poche. Elle y plongea machinalement la main, mais l’ôta aussitôt : elle ne voulait pas savoir qui cherchait à la joindre.

« Prochain arrêt Sandhamn, entendit-on grésiller dans un haut-parleur, le capitaine et l’équipage en profitent pour vous souhaiter un joyeux Noël. »

Jeanette imagina Alice, en essayant de retenir ses larmes. Michael et elle en étaient sûrement aux derniers préparatifs. Les cadeaux attendaient sous le sapin, et la cuisine embaumait le jambon et les boulettes de viande. Les parents de Michael allaient bientôt arriver, chargés de paquets.

Alice l’avait suppliée de venir fêter Noël avec eux. C’était les dernières paroles qu’elle avait entendues avant de s’en aller :

« S’il te plaît, maman, rien qu’un petit moment, quelques heures, au moins ? »

Jeanette avait secoué la tête et tenté de poser un baiser sur le front d’Alice. Mais elle s’était détournée, et la bouche de Jeanette avait à peine effleuré ses cheveux.

Sa mauvaise conscience se raviva. Pourquoi fallait-il toujours que tout rate ?

Ils allaient arriver à destination dans quelques minutes, et elle se leva pour chercher les toilettes.

En ouvrant la porte, elle sursauta à la vue de la femme livide dans le miroir. Il lui fallut quelques secondes avant de se reconnaître. Elle avait de grands cernes sombres autour des yeux, le teint gris. De profondes rides entre le nez et la bouche.

J’ai l’air d’une vieille femme, pensa-t-elle. Où est passé le temps ?

Elle se lava les mains en évitant de se regarder dans la glace.

Le bruit du moteur diminua : le capitaine avait ralenti pour franchir la passe de Sandhamn.

Elle ramassa son sac sur le sol détrempé et le mit en bandoulière. Il n’y avait pas grand monde à bord, mais elle s’attarda pour être la dernière dans la queue.

« Joyeux Noël », dit le marin en prenant son billet.

Jeanette s’efforça de lui sourire.

Les autres passagers avaient déjà quitté le ponton, il faisait trop froid pour traîner inutilement. Jeanette posa pourtant son sac et regarda autour d’elle le paysage familier.

Des congères bordaient la promenade dégagée en bord de mer, entre l’embarcadère des ferries et l’hôtel des Navigateurs. Sur la large plage, des douzaines de bateaux étaient abrités pour l’hiver sous des bâches couvertes de neige.

À l’ouest du port, on apercevait le bâtiment jaune de l’auberge, avec des guirlandes lumineuses sur la façade. Leurs lumières clignotantes faillirent la faire encore pleurer. Elle ramassa son sac et se mit en marche.

 

Une forte odeur de jacinthe flottait dans l’hôtel des Navigateurs. Derrière son haut comptoir, une réceptionniste blonde portait un bonnet de Père Noël. Jeanette se présenta.

« J’ai appelé ce matin pour réserver une chambre. »

La fille lui fit un grand sourire. Jeanette ne put s’empêcher de remarquer combien son rouge à lèvres rose jurait avec le rouge de son bonnet.

« Tout à fait, dit la réceptionniste. Soyez la bienvenue. Vous serez dans un des appartements derrière la piscine. Vous n’avez pas peur du noir, j’espère ? »

Elle sourit de nouveau, comme si elle avait dit quelque chose de drôle.

« Le bâtiment principal est malheureusement complet ce week-end, il ne reste que les appartements de l’annexe. »

Avant que Jeanette ait le temps de dire quelque chose, elle continua :

« Le dîner est servi à partir de dix-neuf heures, vous devez réserver une table. À vingt heures, cela vous irait ? »

Jeanette hocha la tête.

« C’est un excellent buffet de Noël, dit la réceptionniste. Tout ce que vous pouvez souhaiter, quinze sortes de harengs marinés. Et le Père Noël viendra bien sûr dans la soirée voir tous les enfants sages. »

Elle fit un clin d’œil à Jeanette. Elle ne semblait pas douter que la visite du Père Noël puisse vraiment intéresser une femme d’âge mûr.

« Avez-vous besoin d’aide pour vos bagages ? demanda-t-elle alors. Ce n’est pas très loin, à peine cent cinquante mètres. Descendez l’escalier extérieur, puis partez sur la droite. Suivez le chemin déneigé devant le minigolf, puis vous trouverez à droite l’enclos de la piscine. Vous avez le deuxième chalet après l’entrée.

– Ça devrait aller », marmonna Jeanette.

Ses oreilles se mirent à bourdonner quand elle tendit la main vers son sac.

« J’espère que vous allez passer un bon Noël chez nous. Les matines sont célébrées à la chapelle à sept heures demain matin, si vous souhaitez y aller. Il y a d’habitude une très belle ambiance. »

Elle lui tendit enfin sa clé, et Jeanette souleva son sac pour partir. Mais elle se ravisa.

« Il n’y a que moi, là-bas ? demanda-t-elle tout bas.

– Attendez, je regarde ça. »

La réceptionniste se tourna si vivement vers son écran que son bonnet bascula. Elle fronça les sourcils avant de relever les yeux.

« Oui, vous êtes toute seule. »

 

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M
Je connais l'auteur mais je n'ai pas lu ce titre là. A noter donc, je vois qu'il t'a plu !
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