27 Décembre 2021
Résumé : Quatre minutes. C'est le temps d'un souvenir pour Manon. Après, tout s'efface.
Dans ces conditions, pas facile pour Lucie Henebelle de trouver par qui la jeune femme vient d'être agressée. Et de comprendre la signification des mots gravés au creux de sa paume : " Pr de retour ".
Auteur : Franck Thilliez
Nombre de pages : 448
Édition : Pocket
Date de parution : 14 octobre 2010
Prix : 7.60€ (poche) - 7.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2266205030
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Encore un excellent thriller de Franck Thilliez que je viens d'achever et que j'ai lu avec entrain, ayant du mal à refermer quand il le fallait le livre tant l'intrigue a été prenante. Même si cette histoire date de 2004 et que depuis, d'autres livres (dont certains chroniqués ici) du même auteur sont sortis, il est tout à fait possible de le lire comme une histoire à part. On retrouvera ici Lucie Henebelle sans son compère habituel, Sharko, dans une histoire, je l'ai dit, diablement prenante.
Une femme, donc, est retrouvée à quelques pas de l'appartement de Lucie Henebelle. Elle ne se souvient de rien et semble perdue, dans la mauvaise ville, dans un temps qui n'est pas le présent. Il lui est arrivé quelque chose, mais quoi ? Des étudiants l'ont retrouvé en tenue de sport, de la boue jusqu'au cou, des égratignures partout sur le cou, avec des traces de liens autour des poignets. Gravés sur sa main les mots "Pr de retour". Mais qui est ce professeur ?
Grâce à un appareil sur lequel elle enregistre ses progrès, Manon reprend contenance, d'autant que "le professeur" vient de commettre un meurtre, celui d'une femme qui était connue pour avoir torturé ses enfants. Une course-poursuite va alors s'engager pour retrouver le professeur et l'empêcher de tuer, mais aussi de retrouver celui qui s'en prend à Manon. Est-ce un proche ? Et pourquoi veut-on la tuer, elle qui ne se rappelle de rien après quelques minutes ? Quel secret détient-elle dans un coin de son cerveau fragmenté et sur son appareil ? Est-ce que cela a un rapport avec la mort de sa sœur aînée ?
Il va falloir pour Manon, aidée d'Henebelle remonter le cour de son histoire, mais aussi des minutes perdues jour après jour qui, toutes, sont importantes pour la résolution de l'enquête et l'arrestation du meurtrier.
Thilliez prend donc ici pour centre de son intrigue, l'amnésie antérograde, c'est-à-dire l'oubli des événements au fur et à mesure qu'ils se présentent, du personnage principal, Manon. Il en accentue les travers pour les besoins du livre, mais si on se laisse immerger par la lecture, cela passe très bien. L'action et le suspens sont omniprésents et tout au long du livre, le lecteur ne peut s'empêcher de supputer sur l'identité dudit Professeur, mais aussi de son agresseur. Le hic de cette intrigue repose en fait sur Henebelle, qui, une fois de plus, semble presque plus affligée et mal dans sa peau que le personnage principal.
Le suspens dure jusqu'à la fin et un retournement de situation que l'on n'attendait pas arrive pour clôturer l'intrigue, ce qui donne globalement un très bon thriller.
On notera également de la part de Franck Thilliez, une réelle documentation du phénomène sur l'amnésie antérograde ce qui rajoute de la crédibilité au contenu.
A lire également du même auteur sur ce blog :
- Rêver
- Pandemia
- le syndrome E
- Train d'enfer pour ange rouge
- AtomKa
- Gataca
- La forêt des ombres
- 1991
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La mémoire fantôme, de Franck Thilliez - "www.audetourdunlivre.com"
La jeune femme était recroquevillée dans le hall de la résidence Saint-Michel, au cœur d'un quartier abritant un ensemble de grandes écoles lilloises. ISEN, ICAM, HEI... Des étudiants venaient de lui apporter une couverture et une tasse de chocolat chaud, à laquelle elle n'avait pas touché. Mine défaite et apeurée, cheveux noirs ébouriffés, survêtement trempé... Tout, dans ce hérissement fauve, ce repli sur soi, faisait penser à une bête traquée et terrorisée.
En s'approchant , Lucie remarqua sur-le-champ les entailles de cordes au niveau de ses poignets, qu'elle tenait groupés contre sa poitrine. La flic secoua son parapluie et s'accroupit devant elle.
- Vous ne craignez rien. Je suis de la police.
L'inconnue tenta de se relever mais Lucie l'en empêcha en posant une main sur son épaule.
- Vous semblez très éprouvée. Mieux vaut rester assise, en attendant qu'on s'occupe de vous.
Elle souleva délicatement le bas du jogging. La femme grimaça.
- Vous me faites mal !
- Pardonnez-moi...
Marques de cordes également sur les chevilles, presque jusqu'au sang. Lucie se retourna :
- Quelqu'un a appelé le 17 ?
Des hochements de tête négatifs pour toute réponse.
- Je m'en charge, se proposa Jérôme, avant que la flic ait le temps de dégainer son portable.
- Tu dis qu'on a un individu de sexe féminin, trente, trente-cinq ans, à amener aux UMJ.
- Aux quoi ?
- Urgences médico-judiciaires. Éveillée et réactive, mais sans doute victime de sévices. Précise que le lieutenant Henebelle, DIPJ, est sur place. Dis-leur de se magner, okay ?
- Très bien, répliqua Jérôme, téléphone à l'oreille.
La jeune femme s'agitait de plus en plus, ses doigts crispés sur la couverture.
- Ma mère ! Il faut prévenir ma mère ! Marie Moinet, elle s'appelle Marie Moinet, 282, boulevard du Maréchal-Leclerc, à Caen. Oui, à Caen. Et puis... Et puis mon frère aussi ! Frédérick Moinet ! Impasse du Vacher, Vieux-Lille ! S'il vous plaît !
- Nous allons les prévenir, mais le plus important, pour le moment, c'est vous. Comment vous appelez-vous ?
- Manon. Manon Moinet. Nous sommes à Lille ?
- Oui. Je...
- Vous... Vous devez m'emmener chez moi. Même adresse que mon frère. Tout de suite ! Je vous en supplie ! J'ai besoin de mon appareil ! Mon appareil !
- Quel appareil ?
Sans répondre, elle chercha à agripper Lucie, qui lui attrapa calmement les mains et sentit comme une plaie dans la paume gauche.
- Écoutez Manon, je m'appelle Lucie Henebelle, je suis lieutenant de police. Vous ne craignez plus rien et vous allez bientôt rentrer chez vous. Mais il va falloir vous rendre à l'hôpital, pour qu'un médecin vous ausculte. C'est la procédure quand nous recueillons des personnes un peu désorientées. Vous comprenez ?
- Oui, oui. Je comprends parfaitement, mais...
- Ils arrivent dans moins de dix minutes, intervint Jérôme.
- Ok, répondit Lucie. Maintenant Manon, racontez-moi ce qu'il vous est arrivé.
Lucie retourna la main de la jeune femme. Du sans séché. Elle regarda de plus près. La paume, charcutée. Une inscription : "Pr de retour".
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