Au détour d'un livre

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1991, de Franck Thilliez

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Résumé : En décembre 1991, quand Franck Sharko, tout juste sorti de l'école des inspecteurs, débarque au 36 quai des Orfèvres, on le conduit aux archives où il est chargé de reprendre l'affaire des Disparues du Sud parisien. L'état des lieux est simple : entre 1986 et 1989, trois femmes ont été enlevées, puis retrouvées dans des champs, violées et frappées de multiples coups de couteau...

Auteur : Franck Thilliez
Nombre de pages : 504
Édition : Fleuve éditions
Date de parution : 6 mai 2021
Prix : 22.90€ (Broché) - 17.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2265144286

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Avis / Critique :

Haletant.
Impossible de reposer le livre.
Voilà ce que l'on peut dire du nouvel opus de Franck Thilliez qui nous fait partager ici la première des enquêtes de son commissaire, Franck Sharko au sein du mythique 36, quai des orfèvres.
Alors qu'il est chargé de jeter un nouvel œil sur l'affaire des disparues du sud parisien, un homme se présente au 36 et lui fait savoir qu'il a reçu un courrier l'invitant à se rendre à l'adresse d'une certaine Delphine Esmerrieux. Quand Sharko arrive sur les lieux, à Saint-Forget, il découvre un cadavre de femme atrocement mutilé. Très vite, il comprend que des indices se cachent sur la scène de crime. Celui que ses collègues et lui vont surnommé "Le méticuleux", les entraine dans un véritable jeux de piste dont le premier enjeu est de retrouver en vie la prochaine victime avant qu'elle ne meure. 
Très vite, la série d'indices les conduisent dans le monde de la magie avec Houdini et du vaudou. Mais les apparences sont trompeuses tout au long de ce roman qui se finit d'une manière assez magistrale car si l'on finit par deviner la fin, celle-ci est diablement conduite pour nous mener à la vérité.
Et Thilliez a choisi ici un thème qui mêle l'identité de l'être, la science des années 50-60, et la magie.
Pas de temps mort, le rythme est rapide et on a vraiment plaisir à lire ce "1991" et à retrouver la plume de Thilliez. Même, on regrette presque de devoir refermer le livre et de se dire qu'il va falloir attendre un an pour lire le prochain roman de l'auteur. Heureusement, pour ceux qui commenceraient par celui-ci, il y en a d'autres à se mettre sous la dent en attendant.
C'est aussi l'occasion pour le lecteur dans "1991" d'assister à la première histoire d'amour de Sharko, celle avec Suzanne, sa future femme qui connaitra ensuite des jours terribles sous la main de l'Ange Rouge et de se replonger dans une époque où le téléphone portable venait à peine de voir le jour avec le premier Alcatel et où on utilisait encore le minitel et les cabines téléphoniques...
Avec Franck Thilliez, il y a toujours ce côté sombre que l'on retrouve dans les autres romans. Ses histoires se passent souvent (voire toujours d'ailleurs) en hiver. Cette histoire ne fait pas exception à la règle. Le froid, le brouillard, la neige, imprègnent ce roman qui se déroule les derrières semaines de l'année 1991. L'ambiance sombre est donc là et nous enveloppe tel une toile dans laquelle on se laisse attraper avec plaisir.

Bref, un très bon Thilliez, l'un des meilleurs à mon sens depuis le début de sa saga Sharko.

Autres livres de Franck Thilliez sur le blog :

- Rêver
- Pandemia
- le syndrome E
- Train d'enfer pour ange rouge
- AtomKa
- Gataca

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Extrait :

4
 

Un flic de la Criminelle répond toujours au téléphone, quelle que soit l’heure. Thierry Brossard, alias « Titi », fut tiré de son sommeil à plus de 23 h 30 par sa nouvelle recrue venue du Nord. À l’autre bout de la ligne, la voix était paniquée, aussi lui demanda-t-il de se calmer et de parler clairement.

Quand Franck Sharko lui annonça qu’il avait défoncé une porte et découvert le cadavre d’une femme défigurée et torturée en pleine Haute Vallée de Chevreuse, Brossard eut l’impression d’être encore dans son cauchemar. Il gueula au point de réveiller sa femme et ses deux fils, tout en s’habillant, le combiné calé dans le creux de l’épaule.

À la suite de la description faite par son numéro 6, Titi déroula les procédures. Appel immédiat à son adjoint, qu’il chargea de réveiller sur-le-champ le reste du groupe et les gars de la Scientifique. Puis il joignit le substitut du procureur de permanence, lui expliquant judicieusement la raison pour laquelle le groupe d’astreinte n’avait pas été averti.
— Un groupe, un autre, c’est du pareil au même, monsieur le substitut. C’est tombé sur mon dernier de groupe qui n’a même pas un mois de boutique. Ce qui compte, c’est de réagir rapidement. Mes effectifs sont au taquet. On vous attend sur place.

Lorsqu’il franchit le seuil de son appartement, le casque de sa moto dans une main, une Thermos de café dans l’autre, il se retourna pour voir si sa femme allait lui souhaiter bon courage. Le salon était vide. Titi soupira. Il aurait pu faire un détour par la chambre afin de lui annoncer qu’il ne reviendrait pas avant la nuit prochaine, mais il ne le fit pas. Pas l’envie… Ni le courage…

Deux heures plus tard, à Saint-Forget, c’était le branle-bas de combat. Une dizaine d’hommes arrachés à leur lit, saisis par le froid hivernal, avaient investi les lieux. Les projecteurs installés par l’équipe de l’Identité judiciaire conféraient à la forêt un air lugubre.

À proximité des véhicules, Brossard bataillait avec le magistrat contacté plus tôt : il avait vu la scène de crime, et il voulait à tout prix cette enquête. Certes, les Yvelines n’étaient pas sous la juridiction du 36, mais la victime présumée habitait le

Marais, et c’était une photo apportée au Quai des Orfèvres qui avait permis la découverte du corps.

À peine arrivé, Serge Amandier, le numéro 2 du groupe, avait pris à partie le pauvre Sharko. Proche de la soixantaine, il avait le front large, de petits yeux bleus rapprochés, un nez marqué par une tache de naissance rouge sombre. Le genre de flic à l’ancienne, aigri, gros fumeur, qui picolait pas mal et détestait tout ce qui représentait la nouveauté – que Franck incarnait. L’affaire des Disparues du Sud parisien, c’était la sienne. Son obsession. Son échec. Et il ne supportait pas qu’un petit connard fraîchement débarqué du Nord vienne lui parler d’une enquête à laquelle il n’avait même pas participé.

Il décida de passer ses nerfs sur Philippe Vasquez, l’emmenant au chaud à l’arrière d’un véhicule pour tenter d’y voir plus clair. Appuyé contre un arbre, frigorifié, Franck Sharko observait dans son coin chacun de ces hommes. Une traque allait débuter, et il voulait en être. Pas besoin d’être un fin psychologue pour sentir que ce genre d’opportunité ne se présentait pas tous les jours.

Alors, sans rien demander à personne, il enfila des surchaussures et des gants en latex piochés dans le fourgon de la Scientifique et entra dans l’habitation.

Leur numéro 3, le procédurier Alain Glichard, était accroupi au niveau de la porte, un magnétophone posé devant lui. Les constatations, les plans minutieux des scènes de crime, les synthèses concernant le travail de l’équipe et les retranscriptions en langage juridique – les fameux procès-verbaux –, c’était lui.

On l’appelait « le Glaive », parce que sa coupe au bol et sa moustache en guidon aux reflets argentés brillaient tel le métal froid, mais surtout parce que l’homme était raide comme la justice. Jamais un mot plus haut que l’autre ni de coup de gueule, vie privée inconnue. Des mauvaises langues le disaient accro au Minitel rose – 3615 Ulla. Il leva un œil d’un bleu profond vers Sharko.
— T’avais remarqué ce qui était écrit là ?

Il désigna le battant. Sur la face intérieure, on lisait, en grand et en rouge, « PAGODE ». Les lettres, tracées les unes sous les autres, avaient coulé en larmes épaisses.
— Non, dans la panique, je n’ai pas fait attention. C’est… du sang ?
— De la peinture. Dis-moi, comment tu t’y es pris pour défoncer la porte ?
— J’ai donné des coups d’épaule. C’était du costaud. Puis j’ai entendu un craquement.
— Je vois… Regarde : le gros verrou à molette, là, était enclenché à double tour. Quand tu as forcé, tu as arraché un bout de l’encadrement avec la gâche, ce qui a permis l’ouverture.

Quant à la seconde serrure, elle a cédé sous ton poids. La clé d’entrée était posée sur la table dans l’autre pièce. Tu vois venir ma question ?
— Si cette issue, la seule de l’habitation, était doublement verrouillée de l’intérieur, par où l’assassin est-il sorti ?

Alain Glichard s’écarta pour laisser passer le chef de l’IJ, un profil de phasme qui lui signala qu’ils en avaient fini avec les photos et les prélèvements sur le cadavre. Son haleine avait des relents de café froid.
— On a plusieurs types de traces papillaires, ajouta-t-il. Pour le sang, on a relevé une tache isolée sur la poignée de la porte de la chambre qui, avec un peu de chance, appartiendra à l’assassin. Il s’est peut-être blessé en commettant ses atrocités.

Déjà à moitié dehors, il lança à l’intention de Sharko :
— C’est pas pour les mauviettes, là-bas. Ça retourne le cœur. J’ai connu plus tranquille, comme cadeau de bienvenue. Bon courage, inspecteur.

À présent que la voie était libre, les deux hommes s’avancèrent entre les tableaux et les draps suspendus. Glichard portait une grosse sacoche en bandoulière et s’était allégé de son blouson. On n’avait pas coupé les chauffages, car on attendait toujours le médecin légiste, et il importait de laisser la victime « dans son jus ».
— Pour en revenir à ma question, j’ignore par où l’assassin est sorti, reprit Glichard. Pour la serrure, il avait peut-être un double, mais pour l’autre verrou, je ne comprends pas. T’as lu Le Mystère de la chambre jaune, de Gaston Leroux ?
— Quand j’étais gamin.
— On est en plein dedans. Il n’y a pas la moindre fenêtre. Au plafond, c’est une plaque de Plexi inamovible, j’ai vérifié en grimpant sur une chaise. Quant au sol… du béton peint, partout, sur la tôle du container. On est dans une boîte hermétique. T’as une théorie ?
— Aucune.

— Pourtant, vu ce que cette femme a subi, ça m’étonnerait fort qu’elle se soit fait ça toute seule. En quinze ans de carrière, c’est la première fois que je suis confronté à un truc pareil. Et ça me plaît pas beaucoup. Dès qu’il y a un soupçon d’intelligence dans la tête d’un criminel, ça complique les choses.

Des claquements de portières, au-dehors. Des gens arrivaient encore, sans doute les pompes funèbres, le légiste ou le reste du groupe. Une fois le corps levé, ils allaient devoir fouiller chaque recoin de l’habitation. Un travail fastidieux qui durerait jusqu’à l’aube.

 

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