La faille, de Franck Thilliez

Résumé : Une interpellation qui tourne au fiasco. Un officier admis à l'hôpital en urgence absolue. Pour le commandant Sharko, la lieutenant Lucie Henebelle et le reste de l'équipe, la déroute est totale. Violente. Mais la soif de justice est plus forte que jamais. Mis à l'écart le temps que l'IGPN tranche sur sa responsabilité, Sharko se lance alors dans des investigations en dehors de tout cadre légal. Une enquête dangereuse et éprouvante qui laissera des traces.

Auteur : Franck Thilliez
Nombre de pages : 504
Éditeur : Fleuve Noir
Date de parution : 4 mai 2023
Prix : 22.90€ (Broché)- 16.99€ (epub, mobi)
ISBN : 978-2265155565

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Avis / Critique :

Un tueur en série, des EMi négatives, le dark web, une mort cérébrale, des pertes, de la joie, de la peine, des interrogations sur l'éthique médicale, une enquête aux frontières de la mort. Voilà en quelques mots le résumé du nouveau thriller de Franck Thilliez, la Faille.

Revoici donc le duo de choc, Franck Sharko et Lucie Hennebelle, flics, mariés et parents de jumeaux. A nouveau, le couple va avoir affaire à un tueur en série, mais aussi à un groupe qui sème les cadavres derrière lui.

Tout commence par la découverte du corps d'une femme sur lequel la police retrouve du liquide séminal. Il semble que le tueur revienne sur les lieux où il a enterré sa victime dont l'identité demeure inconnue. En planque, l'équipe de Sharko va repérer une camionnette et remonter par ce biais à l'auteur du crime. Mais voilà qu'au moment de l'attraper, celui-ci s'enfuit et meurt, écrasé sous un train. Avant de décéder, le tueur a eu le temps de s'en prendre à Audra, la petite-amie de Nicolas Bellanger, flic et ami de Sharko. L'homme a poussé la jeune femme enceinte, violemment. Audra est transportée à l'hôpital, mais les nouvelles ne sont pas bonnes. Nicolas va être confronté alors à sa belle-famille et une bataille entre eux et lui va alors s'engager concernant Audra et surtout leur enfant à venir.

Parallèlement à cela, Sharko et son équipe, tous ébranlés, remontent sur la piste d'une certaine Emma Dottie dont l'un des membres a été greffé sur la victime. La piste qu'ils suivent pour tenter de retrouver Emma les mène à plusieurs hommes qui se pensent poursuivis par des démons. Ces hommes ont apparemment fait une sorte d'EMI négative, ont eu les cheveux qui ont blanchi étrangement en une nuit, et surtout ils meurent les uns après les autres, tués dans d'effroyables circonstances. Quel est le lien entre ces hommes, les EMI et ce qu'ils nomment la FAILLE ?
Quel est cet endroit étrange, cette expérience dont tous parlent ? Il va falloir pour Sharko et son équipe se frotter une fois de plus à ce qu'il y a de plus sombre chez l'homme pour résoudre cette énigme, s'embarquer dans le Dark Net, se laisser conduire dans un club étrange et même perdre un de leurs meilleurs éléments dans de terribles circonstances.

Une fois de plus, Franck Thilliez n'épargne pas ses personnages. Ici, ce n'est pas un drame, mais deux que vont vivre Nicolas, Lucie, Sharko et les autres. Franck Thilliez divise son livre en deux parties donc, celle de l'enquête et le drame que va vivre Nicolas. A travers le combat de ce dernier, c'est aussi la question de la mort ou de la survie d'un être médicalement assisté qui s'articule. Je ne dirai pas ici l'objet du combat éthique afin de ne pas spolier pour les futurs lecteurs du livre, mais celui-ci nous prend aux tripes et nous fait nous-mêmes nous interroger. On voit jusqu'où les gens qui pensent être dans leur bon droit peuvent aller pour servir leurs intérêts.

L'éthique médicale est d'ailleurs doublement au rendez-vous dans la Faille. En premier, avec l'histoire à laquelle va être confronté Nicolas, mais aussi la résolution de l'énigme entourant le mystère d'Emma Dotty. Jusqu'où peut-on aller pour sauver une vie, pour la science ? jusqu'où peut aller la folie humaine ? Comment mesurer cette folie ? Et comment la définir quand l'amour vient s'immiscer à l'intérieur ? Comment la définir quand le plus sauvage, l'indéfinissable est mis en œuvre pour tenter de sauver cette vie pourtant condamné à la mort, à la destruction ?

C'est ce que nous propose de découvrir ici Franck Thilliez.

Enquête, action, émotions fortes, tout s'entrechoque dans ce livre qui va vous remuer. On sent que l'auteur maitrise son sujet et il n'y a pas de temps mort dans la Faille que ce soit sur l'aspect du thriller comme pour le côté émotionnel. L'auteur le dit à la fin, c'était un sujet qu'il voulait aborder depuis plusieurs années. Il a eu raison d'attendre, car il nous offre un point de vue différent avec l'expérience des EMI négatives. Une fois de plus, Franck Thilliez signe un sacré bon livre qui se lit tout seul, et même s'il fait 544 pages, franchement, vous ne les verrez pas défiler.

Les autres livres de Franck Thilliez chroniqués sur le blog :

- Origines
- La forêt des ombres
- Atom[Ka]
- 1991
- La mémoire fantôme
- Pandemia
- Train d'enfer pour ange rouge
- Angor
- Gataca
- Labyrinthes

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Extrait :

3

Au loin, un chien aboya. Bruits sourds suivis du sinistre crissement métallique d’un train. À l’entrée de l’usine, Franck se faufila sous une barrière antivoiture, dépassa une guérite vide et distingua une flotte de camions-toupies, alignés devant d’impressionnantes montagnes de cailloux concassés. Fermont finissait de gravir l’une d’entre elles. Il jeta un œil derrière lui avant de basculer sur l’autre versant et de disparaître.

La poitrine déjà en feu, Sharko décida de contourner l’obstacle par la gauche. Cent mètres de plus à parcourir, mais faire un détour serait plus rapide que d’escalader. Il se concentra pour rendre son effort aussi efficace que possible, aspirant de grandes goulées d’air frais, puis soufflant vite et fort. Après ce qui lui parut une éternité, il s’engagea en direction d’un nombre incalculable de containers : le seul endroit où Fermont avait pu se réfugier, vu l’immense étendue sans vie alentour, éclairée par des veilleuses.

Il se sentait minuscule entre ces bâtiments de tôle qui, empilés, semblaient crever le ciel. Des couloirs obscurs partaient en tous sens. Sharko bifurqua, tomba dans un cul-de-sac, rebroussa chemin. Deux minutes plus tard, il stoppa net sa course, les mains plaquées sur ses genoux, avec l’impression d’avoir une lance enfoncée dans la poitrine. Il allait vraiment clamser ici.

Lorsqu’il se redressa, il esquiva de justesse la barre de fer qui manqua de lui heurter la tempe. Fermont la lui envoya alors dans les jambes avec un grognement et reprit sa fuite. Le choc au niveau de ses tibias fit hurler Sharko, mais un flux glacé lui donna la hargne de continuer. Ses semelles crantées accrochèrent le bitume, et il ne lâcha rien, gardant le dos noir du criminel en ligne de mire.

Une fois sorti du labyrinthe de containers, l’homme atteignit un grillage par-dessus lequel il sauta, se rapprochant des rails. Franck se jeta à son tour sur la clôture, l’imita du mieux qu’il put et chuta comme un poids mort de l’autre côté, emporté par son élan. Puis il se releva avant de se laisser avaler par la pente et le roulement des gravillons qui l’entraînaient vers le bas. Toute l’adrénaline qui se déversait dans ses artères anesthésiait la douleur. Pour l’instant.

— Arrête… Fermont… T’iras nulle part…

Le fugitif était désormais à la peine tandis qu’il longeait la voie de chemin de fer en se tordant les chevilles sur le ballast. La végétation se resserra autour d’eux, un lasso de ronces et d’arbustes nus qui n’offrait plus, pour unique point de fuite, que le trait étroit des rails. Et ce trait formait une courbe quelques mètres plus loin. Pourtant, Franck n’essaya même pas de braquer son arme, tant son corps tout entier tremblait.

Soudain, un crépitement électrique se fit entendre, comme dans un ciel d’orage. Une vibration tout juste perceptible qui déplaçait subtilement l’air. Le nécrophile dut la ressentir, lui aussi, parce qu’il planta ses deux pieds dans la caillasse, s’immobilisa et se tourna vers son poursuivant. Il n’avait pas le visage d’un tueur sanguinaire, d’un type capable de violer et de mutiler, mais celui d’un quidam en détresse, d’une bête traquée qui transpirait la peur. Franck se figea également, inspira un grand coup et le mit en joue.

— Fais pas le con, Fermont.

Le silence se troublait. Un grondement s’amplifiait. Celui d’une masse de milliers de tonnes qui fendait cette nuit en apparence semblable à toutes les autres. Derrière Fermont, au-delà de la courbe, un halo de lumière apparut. L’homme reculait au fur et à mesure que Franck avançait.

— J’irai pas en taule. Jamais…

Les phares ronds surgirent finalement trop vite. Sharko se jeta sur le côté, le tueur pivota au contraire vers le train et plaqua les mains sur son crâne. Le bruit que provoqua le corps percuté fit frissonner le flic. Le genre de bruit qui s’incrustait au plus profond de vous, à tout jamais.

Les freins émirent un sifflement aigu, ce qui n’empêcha pas les wagons de marchandises de continuer leur lancée. Avec l’inertie, ils ne s’arrêteraient qu’à des kilomètres de là, emportant dans leur sillage le puzzle sanglant de ce qu’avait été un jour Bertrand Fermont.

Franck demeura là, enfoncé dans les herbes, abasourdi. Quatre heures plus tôt, il était chez lui, auprès de ses enfants. Désormais, il se retrouvait avec un suspect en pièces détachées et un membre de son équipe gravement blessé.

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